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LES JULLIACIENS AU SIEGE DE LYON 453 Bientôt cette dernière est coiffée, de toutes ses voiles et de ses gréements absolument hachés ; son capitaine est mor- tellement atteint; mais ses canons ripostent toujours. Après trois heures de combat, l'anglais, voyant cette résistance obstinée, ne cherche plus qu'à couler son adversaire. Plus de 16 boulets percent en l'œuvre vive, l'eau pénètre dans la cale par un flot gros comme le corps d'un homme, 68 cadavres sont étendus sur le pont, tous les officiers sont tués ou blessés'; le maître charpentier annonce que le navire s'enfonce : il faut se rendre au grand désespoir du lieute- nant du Villars, qui, couvert de sang, la tête labourée par un éclas d'obus, le bras droit brisé, la poitrine traversée par un coup de feu, refusant de quitter son poste, criait encore, adossé à la batterie : « Chargez ! et vive le Roi ! » Débarqué d'abord à Falmouth, puis ramené le 10 octobre à Brest, il resta dix-huit mois entre la vie et la mort. La Galette de France ( i ) , dans un supplément, avait appris à la nation entière la glorieuse fin de la célèbre frégate et l'héroïsme du jeune officier. Toute la Cour désira le voir. Présenté à Louis XVI, il fut décoré par le souverain lui- même dans la galerie de Versailles pour la saint Louis 1781; Rentré à Quimper le 15 septembre suivant, nommé capi- taine deux ans après, il obtenait sa retraite le 25 avril 1786, « ses blessures, écrivait-il au maréchal de Ségur, le mettant « dans l'impossibilité de continuer à servir son roi » (2). (1) Galette de France : Supplément du vendredi 11 août 1780, lettre du sieur de la Motte-Tabourel, premier lieutenant de la frégate la Belle- Poule, au secrétaire d'Etat de la Marine. — L. SUSANXE : Histoire de l'ancienne infanterie, t. IV, p. 219. (2) « Monsieur Dervieu, capitaine en second au régiment de Bresse, n supplie M. le Maréchal de Ségur d'avoir égard à la triste situation où « il est réduit : la langueur et le dépérissement où il se trouve actuelle-