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DISCOURS DE M. D'AIGUÊI'ERSE. 217 Mais, de tous les souverains de Rome, celui qui, dans cette lutte honorable, surpassa tous les autres, et peut-être Au- guste lui-même, ce fut Trajan. Jusqu'à lui, Rome presque seule avait profité de la magnificence de ses Empereurs ; les provinces n'y avaient eu qu'une très-faible part. Trajan fut plus juste et plus grand. Si Rome s'embellit par ses soins d'un Forum admirable, notre vieux Lugdunum eut aussi le sien. L'Espagne.surtout, sa patrie, fut richement dotée. Elle montre encore avec orgueil le pont d'Alcantara et l'aqueduc de Sé- govie. De tous les peuples qui avaient le bonheur de vivre sous sa domination, il n'y en eut presque pas un seul qui ne vit s'élever des constructions, le plus souvent utiles, mais tou- jours magnifiques. Ses lettres a Pline le Jeune (1) existent encore comme pour attester avec quel zèle il surveillait lui- même l'exécution de ces travaux dans les parties les plus lointaines de son empire. Le pont jeté sur le Danube était peut-être le plus étonnant de tant de chefs-d'œuvre ; la ja- lousie de son successeur le détruisit bientôt après. Adrien fut passionné pour les arts, mais ce fut moins en Empereur qu'en artiste jaloux de ses émules. Il ne lui suffi- sait pas d'être au-dessus du monde entier par la puissance, il voulait encore être le premier dans les lettres, les sciences et les arts. Malheur au savant ou à l'artiste assez imprudent pour lui disputer la supériorité dans quelque genre que ce fût. On sait qu'il en coûta la vie au célèbre Apollodore pour avoir osé critiquer un de ses ouvrages, le temple de Fènus et Rome, dont les ruines subsistent encore entre le Colysée et l'Arc de Titus. Ce prince rassembla dans sa villa de Tibur toutes les merveilles que peuvent enfanter les arts à l'aide d'immenses richesses. Sous les deux Antonins, ces arts se maintinrent avec le (IV Pline. Epislol. Lib. X.