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446 LE D0CTEUK JEAN FAUST. Ce fut d'abord Lucifer, jadis l'ange de lumière, maintenant l'ange des ténèbres, aussi sombre et aussi noir qu'il fut autrefois pur et resplendissant. C'était un grand homme velu, chevelu, barbu. Çà et là seulement, la peau de son corps ap- paraissait par plaques nues el brûlées ; celte peau d'un vert rougeâtre rappelait la nuance roussie des feuilles d'une forêt incendiée. Sa grande queue visqueuse et luisante tombait sur ses talons et était ornée à son extrémité d'une touffe de poils mal soignés. Béelzébuth marchait après lui, avec un corps humain, long, maigre, osseux, couvert d'un poil tacheté de mèches jaunes el vertes, disposées comme les mèches noires et blanches de l'hermine ; il avait une énorme tête de bœuf qui vacillait sans cesse sur son grand cou grêle et décharné, comme si ce mince pivot n'eût pas eu la force de la soutenir. Ses gros yeux stupides semblaient prêts à tomber de leurs cavités. 11 avait une queue de dragon. Astaroth, qui venait ensuite, était un serpent de grande dimension qui marchait sur la pointe de sa queue. Il élait recouvert d'écaillés étincelanles qui rendaient un son métal- lique à chacun de ses pas. Il avait un ventre énorme, aux flancs larges et essoufflés el au milieu duquel une longue touffe de poils gris et sordides lui formait un nombril d'un aspect vraiment fantastique. A la vue de ce serpent, Faust reconnut le séducteur de la mère du genre humain et se dit avec justesse: « Comment notre mère Eve a-l-elle pu se fier aux promesses de cet affreux animal? Horreur ! » Satanas parut ensuite. Il avait un corps d'homme gras el bien rebondi, à la peau fraîche el rosée, à l'aspect jovial et bachique. Mais, hélas! une lêle d'âne au poil gris, aux immenses oreilles, à l'air niais et rélif, se balançait sur ses grasses el blanches épaules et formait avec elles un odieux con- traste. Il avait la queue d'un chat el le pied fourchu d'uu bœuf.