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4S LES TROIS CHAPEI.QX.
biographie de trois poètes, l'économie politique. Toute la ques-
tion pour nous est de savoir si une chanson bien simple et
bien consolante du charitable abbé ne valait pas mieux, par
exemple, que : le Chant des travailleurs. J'ai voulu constater un
fait et en dire les causes, et, Ã ce propos, je me garderai bien
de citer la phrase si effrayante d'Adam Smith sur la concurrence.
Je me borne à dire que je regrette, de toute mon âme, les chan-
sons du bon vieux temps, pleines de malice, mais sans fiel.
Pendant le XVIe siècle, car sa véritable importance de ville
industrielle ne date que de là , et pendant le XVII e siècle aussi,
Saint-Etienne fut une des plus singulières villes de France. Ses
habitudes, ses moeurs, ses coutumes, ses confréries, ses corpo-
rations, ses communautés religieuses, ses libertés municipales,
sa garde bourgeoise divisée en compagnies, ayant chacune sa
devise, et un nom plus ou moins original, ses jeux, ses fêtes
publiques , son patois surtout si naïf et si vigoureux , une des
variétés infinies de la langue d'oc, plus doux que l'auvergnat,
niais moins que le languedocien et le provençal, bien plus poéti-
que et moins rude que le limousin, tout cela lui donnait une
physionomie vraiment à part. Aujourd'hui, rien de tout cela que
des vestiges, qui, peu à peu, tendent à disparaître. Le patois
ne se parle guère plus que dans les rangs populaires. Envahi de
jour en jour par le français, il commence à perdre sensiblement
son caractère primitif.
Les paysaus de Bourgogne chantent encore les noëls si naï-
vement spirituels de Gui-Barôzei ; Goudelin, l'Homère de la Gas-
cogne, est toujours en grand honneur à Toulouse : les Provençaux
n'ont pas oublié Brueys et la Bellaudière (1); Jasmin est aujour-
d'hui l'oracle de plusieurs provinces de l'Ouest, et les trois Cha-
pelon, hélas! ne seront bientôt plus compris par leurs propres
concitoyens! Il y a plus, les descendants de ces hommes qui
ont fait la gloire et l'orgueil de Saint-Etienne, ignorent complè-
tement quelle fut leur vie, la dale. de leur naissance et celle de
1) Loys Belliui ou BeUmd , connu généralement sons le nom de l,a
Bellaudière, en palois Bellaudieio.