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LE VEAU D'OR. 109 A le risible aspect d'une laide poupée. Si je fais maintenant parader sous mes yeux De vos petits garçons le bataillon joyeux, C'est pour eux que ma verve ernploîra la satire. Je ne peux pas les voir sans un éclat de rire. Sans cesse à les vexer le bon genre assidu, Leur met des falbalas : le sexe est confondu. Entièrement couverts de rubans et dentelles, Vous voyez les pauvrets changés en demoiselles. Soumis aux volontés de leur belle maman, Ils sont même très-fiers de leur accoutrement. C'est vraiment bien heureux: quand j'étais à leur âge, Je n'aurais pas, je crois, enduré cet outrage. Je plains de tout mon cœur ces petits élégants : Leurs mollets sont tout nus, mais leurs mains ont des gants. Pour les garder bien beaux, la tyrannique mère Défend aux malheureux de manier la terre, De se traîner sur l'herbe, ainsi que des gamins, Surtout d'ôter les gants, qui distinguent leurs mains. L'habitude des gants ! mais c'est de la morale. Vivez après cela de la vie animale, Soyez intelligent comme un aliboron, Volez en pleine bourse, ainsi qu'un vrai larron, Tout sera pardonné : personne dans le monde Sur votre fond pourri n'essayera la sonde. Le papa, du veau d'or fervent adorateur, Chaque matin au temple encense le Seigneur. Suivant lui le Pactole a sa secrète source, Dans un coin retiré du pays de la Bourse. 11 apprend à son fils à suivre le chemin, Qui conduit sûrement vers le fleuve divin. Pensez-vous qu'aux abords de la source sacrée On rencontre une nymphe, épouse de Nérée, Recouvrant ses appas de modestes roseaux, Ou buvant simplement dans l'onde des ruisseaux ?