page suivante »
LE VEAU D'OR. 107 Souvent le lendemain vient vous rendre visite. Pour chasser l'importun de votre appartement, Vous n'avez plus chez vous le Champagne écumant, Le punch et le bordeaux, la musique entraînante, Et du galop sans frein la bacchanale ardente; Seules vous vous trouvez, et la sainte raison, Un instant malgré vous brillant sur l'horison, D'un œil compatissant tristement vous contemple. Elle porte en ses mains l'aide du bon exemple, Et fait paisiblement, au travers des vapeurs, Passer sous vos regards vos mères et vos sœurs. Maintenant mon esprit doucement se promène Sur le nouveau terrain d'une tout autre scène. La femme que je vois ne hante pas le bal, Et ne fait pas de rien son objet principal. Inconnue à la foule, elle se trouve heureuse De porter au malade une aumône pieuse, Et, voilant sa vertu des ombres de la nuit, Elle cherche le pauvre en son triste réduit. Inclinons notre front: les Dames du Calvaire, Martyres chaque jour en pansant une ulcère, N'ont pas même le sens de leur sublimité, Et marchent humblement dans leur simplicité. La mort les prend sans bruit, et nos académies N'ouvrent pas de concours pour leurs biographies. Suivons en Orient, jusqu'à Sébastopol, Les héroïques sœurs de Saint-Vincent-de-Paul; Oh! combien je voudrais qu'un inspiré poète Fît briller l'auréole au-dessus de leur tête ! C'est vrai qu'elles n'ont pas assailli les remparts Et sur le parapet planté nos étendards ; Mais, si vous visitez la sanglante ambulance, Le blessé vous dira s'il bénit leur présence, Si de la poudre russe elles craignent l'odeur Et si le choléra fit hésiter leur cœur !