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C'est là , sous ces arbres centenaires de l'avenue, que
nos jeunes têtes se forgeaient des rêves d'avenir dont
nous nous faisions part l'un à l'autre avec un naïf en-
thousiasme. Combien de fois, en hiver, n'avons-nous pas
tracé un sentier dans la neige qui couvrait les allées ?
Combien de fois ne nous sommes nous pas endormis,
pendant les chaudes soirées d'été, dans l'herbe qni borde
les fosses du parc ?
Se voyant seul au mondé et pensant que son modeste
patrimoine ne lui permettrait pas d'attendre à loisir une
position en France, Gabriel parlait souvent de splliciter
une place de Substitut dans les colonies. Il caressa si
bien cette idée qu'un jour, son droit terminé, il me
montra d'une main tremblante une lettre qu'un ami de
sa famille lui avait remise pour le procureur général
d'Alger, auquel il allait s'attacher ; puis il m'annonça
son prochain départ et me pria de lui écrire souvent.
Trois ans après, mon ami m'apprenait qu'il était
substitut dans la province de Constantine. Son nouveau
genre de vie lui plaisait ; 'les nécessités de son service
exigeaient une très-grande activité ; le jeune magistrat
faisait des courses à cheval dans les montagnes à en
rendre jaloux l'oncle Philibert.
Cependant ce régime excessif ne tarda pas à porter
atteinte à sa santé. Au printemps, Gabriel repassa en
France avec un congé de convalescence de six mois ;
Ilfallait prendre les eaux de Salins. Cette bonne nouvelle
vint me trouver à Dijon, et je m'empressai de promettre
à mon ami une visite â la Touvette pour le mois de
septembre.
Un matin d'août, de bonne heure, là porte de ma
chambre s'ouvrit : je m'entendis appeler par mon nom
et je vis entrer un grand jeune homme brun... C'était lui.