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LE DOCTEUR JEAN FAUST. 439 çanl une terrible imprécation, il coupa la fleur au niveau du verre. Au même instant, la lêle d'un des assistants qui se tenait dans un coin obscur, roula par terre en bondissant, tandis que celle du valet, délivrée du sorl fatal, se maintint ferme et pleine de vie en sa place ordinaire. Le patient ouvrit enfin de grands yeux étonnés, comme un homme qui sort d'un profond sommeil ; il avait, disait-il, entendu, vu et compris tout ce qui s'était passé, et grande avait été sa frayeur, au moment où l'opération avait été sur le point de manquer dans sa période la plus intéressante pour lui. On voit par là que l'art de couper des têtes sans que mort s'en suive était pratiqué bien avant que les habiles prestidi- gitateurs du XIXe siècle ne l'eussent remis en vogue dans leurs séances de magie soit-disant blanche. Pour moi, je ne crois pas que cette magie blanche, bien qu'elle ne serve plus, grâce au ciel, qu'à divertir les enfants et les bonnes d'enfants, soit aussi blanche qu'on veut bien le dire. Robert-Houdin coupe des têtes, qu'il est certain de remettre ; car, s'il venait à manquer son coup, il serait pris en contravention; ce qui pourrait lemenerloin. Faust, lesorcier Faust, en coupait aussi et les remettait. Ceci me confirme dans l'opinion que j'ai toujours eue que Robert-Houdin et ses élèves sont de parfaits sorciers ; que leur seul et véritable compère, c'est le diable; et que ces paroles mystérieuses et celte baguette noire, faite en apparence simplement pour donner unecertaine couleur locale à leurs opérations, sont tout bonnement les paroles et la baguette magique des enchanteurs du moyen-âge ; laquelle baguette, si elle venait à se briser par hazard, pourrait bien montrer au yeux des spectateurs attentifs à saisir les ressorts cachés de toutes choses, la longue griffe de Satan, avec lequel le mol charlatan rime de la façon la plus heureuse, et donl le plus grand plaisir est déjouer des tours aux innocents.