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400 ÉTUDE SUR LA LANGUE DES HÉBREUX. ture, moderne ; avec cette façon irrégulière qui n'est qu'à lui et à la Bible, il a refait ce conducteur du peuple de Dieu, génie moitié sublime et moitié sauvage. L'œuvre de Dieu et l'œuvre du génie voisin de Dieu, n'ont que faire de cette habileté et de ces artifices ingénieux que les livres enseignent à la foule. Nous avons jusqu'ici considéré l'idiome juif dans ses élé- ments et dans son mécanisme matériels. Mais il y a dans son sein une vie plus haute et des influences plus profondes. Ce sont les principes et les sources auxquels il a puisé ses inspira- tions. Le peuple juif a été placé dans le cours de sa vie sous deux influences : la nature d'une part et la divinité de l'autre. Son ca- ractère s'est composé de l'alliance de ces deux traits différents. Peuple nomade, errant à travers les solitudes , par des nuits se- reines où l'armée du ciel marche dans le silence, sur un sol brû- lant , que le vent du désert parcourt seul avec lui ; au sein de l'espace immense et des horizons sans fin , il éprouve en son cœur d'étranges impressions. Son esprit simple, naïf, s'ou- vre pleinement à l'influence des choses visibles ; il aspire par toutes ses facultés cette vie de la nature qui l'entoure, comme la plante aspire dans ses tissus les sucs terrestres qui baignent ses profondes racines. Nous qui naissons sur une scène si différente et qui de bonne heure livrons notre âme aux fascinations de la société et à ces impressions artificielles et corruptrices que J.-C. dans son beau langage, a appelées la sollicitude du siècle et la tromperie des richesses (Matth. xm, 22), nous avons de la peine à nous figurer ce calme et cette sérénité de la vie patriarcale, à comprendre cette infiltration lente et silencieuse de la nature dans les profondeurs de, l'âme humaine. Nous avons appris à nous poser froidement en face de la réalité et à la soumettre à nos calculs et à nos raisonnements. Mais l'homme primitif qui tous les jours errait à la merci de phénomènes mystérieux et sans nom, ne pouvait se défendre contre le vague et merveilleux pouvoir qu'exerçaient sur lui ses propres sensations ; il subissait sans défense l'empire de tout ce qui l'entourait. Ainsi le fils d'Israël se laissa profondément pénétrer de cette longue et con-