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DE L'INFINI. 383 n'y avait pas de rapports entre Dieu et l'homme, Dieu ne pour- rait rien sur nous et nous n'existerions pas. Nous existons, donc il y a entre Dieu, être essentiel, et nous, êtres condi- tionnels , des rapports de substantialisation, s'il faut forcer l'esprit par un mot ; rapports qui lui rattachent ontologique- ment notre existence et que nous nommons religion. Et si, déjà , l'homme périt séparé de la Société, qui ne renferme que ses conditions temporelles, que sera-ce séparé de celui qui donne l'être et de qui vient tout don parfait ? Mais s'il existe des rapports entre Dieu et l'homme, il en existe entre l'homme et Dieu : et telle est la noblesse de la Création. Libre, intelligent et inviolable, où sera, s'il ne coo- père , le mérite et l'intelligence, le fruit de sa liberté ? Où sera, question première , le motif pour lequel Dieu lui don- nera l'existence ? Sans la liberté, comment pourra-t-il offrir à Dieu une preuve de son amour ? oui s comment l'homme pourra-t-il offrir la preuve de sa propre gloire ! Si l'âme n'éta- blit pas avec Dieu un rapport en retour, le rapport établi par Dieu reste inutile à la créature spirituelle et méritante. Ne s'agit-il pas de son développement propre, du fruit de sa li- berté, de la fonction de l'homme? Y renoncer c'est renoncer à son essence, et sortir de l'espèce humaine... l'ingratitude dé- molit chez nous la raison. Quoi ! l'Infini est tout pour l'homme, et l'homme, par sa propre excellence, ne voudrait rien être pour Dieu ! L'homme est confié aux soins de ses œuvres : eh bien un être confié aux soins de ses œuvres doit savoir que son progrès et sa grandeur en dépendent ! Les bêtes au moins suivent leur loi. Les esprits sont si surprenants depuis qu'ils quittent la raison, qu'ils croient exister par eux-mêmes. Une fois nés, l'Absolu leur est inutile, Dieu peut se dispenser de subsister. D'abord ils croient que l'Être n'eut pas besoin d'être infini pour exister... Ils croient qu'une substance peut subsister