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                          ANTOINE BERJON.                         161

une fois de plus, à propos de Berjon, cette maxime qui n'est
peut-être pas tout à fait aussi ancienne que les arts, c'est qu'en
écrivant l'histoire de sa vie il est dangereux pour celui qui veut
l'aire connaître l'homme en jugeant l'artiste d'en parler quelque-
fois avec une sévérité de langage qui peut paraître injurieuse
et blessante pour sa mémoire, c'est que s'il fut en effet un grand
artiste dans un genre secondaire, il est également vrai d'ajouter
qu'en lui l'heureux accord du caractère et du talent ne s'est ja-
mais montré. Peut-êre sera-ce pour nous, qui voulons essayer de
faire connaître cette vie étrange, un écueil difficile à éviter, et, si
malgré nos efforts nous ne réussissons pas à le tourner avec bon-
heur, nous n'aurons pas oublié du moins que toutes les particula-
rités de la vie intime des hommes remarquables n'appartiennent
pas sans réserve au public, et dans le récit de cette existence si
largement pourvue d'éléments pittoresques nous élaguerons avec
soin tout ce qui pourrait nous faire départir de la délicatesse et
de la réserve obligatoires en raison même de la nature et du
choix de notre sujet.
    C'est par suite d'une erreur commune à tous ceux qui ont écrit
sur Antoine Berjon, qu'on l'a toujours fait naître en 17SO; au-
jourd'hui, après de longues et patientes recherches poursuivies
sur les registres de la paroisse de Saint-Pierre, de Vaise, par un
peintre de talent, M. Martin Daussigny, il a été reconnu que
Berjon est né dans la circonscription de cette paroisse, le 17
mai 1734, de Simon Berjon, boucher à Vaise, et de Pierrette
Lablatinière, son épouse, et comme il est mort à Lyon le 28 octo-
bre 1843, âgé de plus de 89 ans, sa longévité, quoique fort re-
marquable, l'est cependant un peu moins que des informations
 incomplètes l'avaient fait paraître tout d'abord. La condition'de
 ses parents était des plus humbles, puisque son père était maître
boucher, comme on disait alors, et c'est sans doute l'humilité
 d'un pareil état qui aura fait penser à quelques biographes que
cet artisan désireux, comme tous les pères de famille, d'assurer
 à son fils un sort meilleur que celui qui lui avait été départi
 n'avait imaginé rien de mieux que de le faire entrer comme
 novice dans un des nombreux couvents qui existaient alors
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