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Mais la Russie dévore la population allemande des pro-
vinces qu'elle a englobées, et son despotisme ne peut rien
offrir en dédommagement de la perte des droits particu-
liers.
   Y a-l-il un temps de prescription pour la conquête ?
après combien de siècles peut-on dire qu'une province est
définitivement acquise au territoire d'une race voisine ?
à quels caractères reconnaîl-on que l'assimilation des po-
pulations est parfaite ? ces caractères sont-ils fournis par
le physique, par les mœurs, par la langue, par la littéra-
ture, ou bien par les intérêts commerciaux et politiques?
y a-t-il enfin un moment où l'on peut effacer complète-
ment les limites naturelles ? Ces questions du domaine de
la haute politique, ne peuvent être disculées ici.
   Que l'on puisse fixer ou non un terme après lequel la
prescription est reconnue, il n'en est pas moins vrai qu'il y
a de ces contrées dont les limites naturelles sont faiblemen t
tracées, qui, depuis le commencement des temps histori-
ques ont été alternativement conquises par l'une et l'autre
race. Lorsque celles qui s'en disputent la possession, recon-
naissent une origine en partie commune et peuvent par
conséquent contracter une alliance durable, je dis que
l'existence de telles contrées indéterminées et de transition
présente les plus grands avantages au développement de la
civilisation. Les populations qui les habitent deviennent les
interprètes des deux races, elles sont les truchemans de
leurs pensées, de leurs sentiments, de leurs besoins, de leurs
intérêts, de leurs littératures. Elles garantissent par cela
même aux deux nations l'intégrité de leur indépendance,
et la conservation pure de leur nationalité. Au contraire,
lorsque les frottements de deux nationalités sont immédiats,
l'une sera le plus souvent modifiée, altérée et même dé-
truite par l'autre.