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229 Messieurs, que Dieu gouverne le monde, et nous voyons que partout l'idée domine la forme comme l'ame régit le corps ; elle y supplée, elle la modifie, elle la brise môme au besoin comme une entrave impuissante. En matière d'éducation, elle compense l'infirmité des méthodes, et sans elle, les plus savantes demeurent pauvres en résultats. Pourquoi ne pour- rions-nous pas appliquer à cet ordre de choses le mot si pro- fondément vrai de l'Écriture : La lettre tue et l'esprit vivifie ! S'il m'était permis, en effet, de hasarder quelques considéra- tions historiques, il me semble qu'il serait facile de montrer que les temps où se manifeste avec le plus de faveur le goût des formes, des catégories, des méthodes, des rite3 exté- rieurs, sont presque toujours des temps de décroissance morale, ceux où il y a le moins de réalité profonde, le plus d'infirmité intellectuelle. De là , Messieurs, ce mépris et ces anathèmes de l'Evangile contre le Pharisaïsme slupide qui réduisait tout aux observances légales. De là cette étonnante assertion d'un philosophe de nos jours, que l'intégrité de mœurs et le respect du droit sont en raison inverse de la multiplicité des lois formulées et écrites. De là aussi peut- être cette sorte d'insouciance relative qu'on reproche au ca- tholicisme pour les moyens mécaniques et les petites indus- tries. On s'étonne quelquefois que les protestants soient plus méthodiques que nous dans les arrangements de la vie pra- tique, dans l'organisation de leurs prisons, de leurs écoles, de leurs œuvres de bienfaisance. Messieurs, la religion ca- tholique se garde bien de mépriser ces choses ; elle ne craint pas môme de les emprunter au besoin ; mais il est très vrai qu'elle s'en préoccupe un peu moins que les sectes rivales, forte qu'elle est d'une vie morale plus puissante, plus riche de charité et d'idées et par conséquent plus féconde en ma- gnifiques résultats. Quand l'esprit est fort, Messieurs, quand la sève des principes est abondante, tous ces moyens si com-