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n'a jamais l'intention de faire du mal; il espère toujours faire
cesser le danger avec des menaces.
   « Je n'ai pas eu la politique, parce que je ne la connais pas,
de ménager tous les partis ; j'ai toujours été fortement attaché
 aux grands principes, sans lesquels, je vous le dis, vous qui
m'écoutez, il n'y aura plus de liberté, il faudra y renoncer à
jamais, en tombant dans la nuit affreuse de la tyrannie, qui
achèvera d'anéantir toute vertu sur là terre...
   « Ah! s'il m'était permis d'épancher mon ame, on la verrait
tout entière, je vous tracerais en caractères de feu les maux
incalculables dont la patrie est menacée du moment que je me
suis vu privé de ma liberté. Oui, me suis-je écrié, c'en est fait
d'elle, puisqu'on arrête son meilleur ami, son intrépide, son
sincère défenseur... Je suis dans la môme situation de Socrate
ou de Jésus ; car quel est l'homme qui, au bas de la galerie de
Pilale, aurait eu le courage de dire: Il est innocent, je l'ai en-
tendu, sa morale est pure et ses vertus rares? Le torrent du
peuple, égaré par les Scribes et les Pharisiens, n'aurait pas man-
 qué de faire main-basse sur cet homme (1). »
   Après la prise de Lyon, les mânes de Chaïier reçurent des
honneurs presque divins-, Collot d'Herbois etFouché envoyèrent
à Paris son buste en salpêtre et l'image en cire de sa tête muti-
lée, telle qu'elle sortit de sous la hache du bourreau. Ils furent
présentés par une dépulation aux Jacobins, à la Convention et
à la Municipalité, ainsi que la femme Pic, sa gouvernante. Le
 20 décembre, une fête d'apothéose fut célébrée dans la grande
 salle de l'Hôtel-de-Ville ; le 22, la Convention décréta que l'Etat
 accordait à sa gouvernante une pension égale à celle de la veuve
 de Rousseau , et que ses restes seraient portés au Panthéon Son
 buste seul y fut placé pour en être bientôt arraché avec celui de
 Marat et traîné dans un égoùt par la rage des réactionnaires.
 En 1794, un mannequin qui le représentait fut promené dans
 Lyon et brûlé sur la place des Terreaux le jour de la fête de la
 Concorde.

  (1) Dans une prochaine livraison nous publierons ce que nous avons pu re-
eueillir de sa correspondance.