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LETTRES DE L'ÉCOLE. NORMALE 477 feuille de papier séparée en deux colonnes par un trait de plume; une de ces colonnes sera pour les lettres reçues, l'autre pour les lettres écrites et toutes les fois que j'écrirai ou que je recevrai une lettre, je ne manquerai pas de l'enre- gistrer soigneusement avec sa date, en mettant au tantque pos- sible en regard, celles qui seront de la même époque et qui se rapporteront aux mêmes faits, Ce soir ce sera fait pour toute la fin d'octobre et le commencement de novembre. De cette manière je serai je crois plus régulier et d'un .autre côté je risquerai moins de ni "impatienter, en ne recevant pas les réponses à mes lettres, car j'aurai une idée plus juste, du temps écoulé et je veux y mettre pour épigraphe ces deux vers de Virgile : Seâ fugit interea, fugit irreparabile tempus brève et irréparable tempus Omnibus est vila. Ce temps est en effet bien irréparable ! Tout occupé de ces pensées, je ne t'ai pas encore dit combien je t'aimais, je ne t'ai pas encore dit que je pense bien souvent à toi, que bien souvent par la pensée je te presse sur mon cœur, et que surtout lorsque je prie,,: la meilleure part de ce que je demande à Ce Dieu qui est le dispensateur de toutes les grâces, se rapporte à toi, à .mon cher Joannès, la plus douce espérance de mon avenir. Je sais bien peu ce qui adviendra de moi, j'ignore tout..à fait si le bon Dieu veut que je vive dans le-.saint sacrement du mariage, ou s'il m'a destiné une existence plus solitaire; mais quoi qu'il en soit, je sais déjà qu'il m'a donné une large part aux joies humaines, en me donnant un bon frère qui m'aime et pour un si grand bienfait, j'ai déjà bien des grâces à lui rendre. N° 6. — Juin 1897. 32