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430              LETTRES D'HIPPOLYTE FLA-NDRIN

ont bien pu corrompre l'esprit et le jugement de ces jeunes
gens, mais il leur reste un cœur, et c'est là que touchent
ces hommes admirables (4). Ils présentent les choses avec
une candeur, une innocence qui les fait aimer, et quelque-
fois ils s'élèvent si haut, ils sont si grands, si terribles, leur
imagination est si brillante, si forte, que très peu (4 bis)
restent insensibles. Le bandeau tombe, ils reviennent à
Rome, courent au Vatican pour la première fois, y voient
quelque chose, admirent et font des projets de réforme;
mais ils ne restent plus qu'un an et ça passe vite. Ils ont
fini leur temps, il faut quitter ce beau pays et ces chefs-
d'œuvre, et dans leur désespoir, ils maudissent l'enseigne-
ment qui leur a fait perdre les quinze plus belles années de
leur vie. Ce que je dis là est l'histoire de plusieurs qui
viennent de partir ou qui vont partir. Quel affreux
malheur! et que ne devons-nous pas au maître qui nous
a ouvert les yeux et mis en bon chemin (5)?
   Je viens de recevoir votre lettre, et comme les précé-
dentes, elle m'a fait\ grand plaisir. Elle est pleine de choses
intéressantes; et entre autres, votre connaissance avec
M. de Montalembert m'a enchanté, d u e je suis content
que vous vous soyez enfin décidé à l'aborder, car autant
que vous je désire savoir ce qu'ils (6) ont dans l'idée et
j'espère bien qu'à Paris vous n'oublierez pas son invitation.
Je vous remercie bien du récit de votre voyage de Paris à


   (4) Les maîtres qu'il vient de citer.
   (4 bis) Sous-entendu « des jeunes peintres ».
   (5) On sait que les élèves de M. Ingres ont tous été fanatiques de
leur maître.
   (6) Ils signifie M. de Lamennais et son groupe, dont M. de Monta-
lembert était une des plus brillantes figures.