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LETTRES D ' H I P P O L Y T E FLANDRIN 43 I Lyon par l'Auvergne. Il est plein de détails charmants et j'aurais bien voulu, pour quelques jours seulement, quitter Rome et vous trouver à la Grande-Chartreuse. Mais non : cloué pour cinq ans, ou bien renoncer (7) !! ! Oh! c'est une chose curieuse et plus absurde encore que le règlement de l'Académie. Figurez-vous d'abord que pendant trois ans les peintres ne peuvent aller à plus de dix lieues de Rome, c'est-à -dire ils peuvent se promener dans la plaine et les montagnes environnantes, mais aller seulement à Orvieto, à Assise, à Florence, toutes villes remplies de merveilles ; non, le règlement le défend! Cependant, comme je vous le disais tout à l'heure, il y en a plus qui ouvrent les yeux à Florence qu'à Rome. Puis, je trouve le séjour de la villa Médicis délicieux. Mais comme j'aimerais mieux avoir ma pension et être libre ! Il y a là une sorte de vie commune qui ne me convient pas. Comme dit M. Ingres, les influences entrent par les pores de la peau, et en effet, dans cette société forcée, dans ce frottement des caractères, tout ce qu'il y a de saillant s'amollit et s'efface; mais je sens le danger, et Dieu me garde de jamais marcher avec eux! Cependant j'en ai trouvé un, dont M. Ingres et M. Orsel m'avaient parlé. C'est un graveur nommé Vibert. En arrivant ici il était des plus encroûtés, mais la vue des belles choses, le changea entièrement. Aidé de quelques conseils de M. Orsel, il entra dans l'excellente route où il est main- tenant. Nos idées sur la peinture s'accordaient parfaitement, et comme homme, tous les jours je l'aimais et l'estimais (7) On sait que les élèves de la villa Médicis ne peuvent remettre le pied en France sans perdre tous leurs droits, â moins que cette dispo- sition n'ait été récemment modifiée.