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100 PAUL HUMBLOT les incrustait dans l'esprit du magistrat. C'était un con- vaincu, plaidant avant, pendant et après, croyant ferme- ment au bon droit de sa cause, la défendant avec une pas- sion obstinée, une affection toute paternelle, une ténacité que rien ne rebutait. Il ne pouvait plus s'arracher de la barre, croyant qu'il n'avait pas assez dompté le juge sous l'évidence de ses raisons, ayant sans cesse le scrupule de n'en avoir pas assez fait pour ce qu'il croyait être la vérité. Et cette conviction qui l'animait, les défaites même ne pouvaient l'ébranler. Inconsolable de la perte d'un procès, il le discutait encore après une année, lorsque l'occasion le ramenait vers ce déplaisant souvenir. Pourrais-je dans ce coup d'œil si rapide jeté sur la barre, ne point apercevoir le frère même d'Humblot. Il n'était pas demeuré à Lyon, pensant avec raison que le voisinage fraternel, qu'une involontaire et inévitable concurrence ne pouvait qu'être nuisible au succès de l'un et de l'autre et paralyser leurs communs efforts. Il s'était fait inscrire à Saint-Etienne, où bientôt il devint l'avocat des grandes Compagnies et conquit le premier rang. Quand il venait plaider à la Cour, on appréciait la limpidité, l'ordre et l'élégance correcte de son discours; et l'on comprenait que le talent de la parole est parfois le don de toute une famille. Il en est aussi le legs. Le fils de Henri Humblot continue la tradition paternelle ; et ses deux neveux occupent au Barreau de Saint-Etienne les places les plus honorables. Me Bréchignac jouit de l'estime de tous et Me Courbon a hérité de l'importante clientèle de son oncle. Nul mieux que lui ne connaît les questions de mines ; et les affaires si lourdes et si compliquées qu'entraînent toujours après elles les grandes exploitations houillères trouvent en lui l'inter- prète le plus habile et le plus clair.