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52              UNE ÉVASION A PIERRE-SCIZE

ouvertes. D'après ces observations, je me formai une idée
de la nature du terrain sur le côté extérieur du château qui
m'était inconnu, puisque j'étais arrivé par celui qui domine
la Saône, jugé impraticable pour une évasion, ainsi que je
l'ai dit plus haut.
    « Après avoir gravi le roc, on me fit traverser la cour en
question : je me trouvai au pied de la grosse tour dont j'ai
déjà précisé l'emplacement. On me fit monter par un esca-
lier tournant, sur une galerie en bois, et je fus enfermé
dans la chambre numéro i, attenant à la tour même, de
telle sorte que son demi-cercle en occupait une partie. Je
rencontrai dans cet agréable domicile le mobilier obligé,
un mauvais grabat, accolé au mur demi-circulaire de la
tour, une chaise, une table et la grande cruche d'eau de
rigueur; le jour me venait de la cour intérieure, par une
fenêtre bien grillée, et donnant sur la galerie. Telle était la
disposition des lieux et tels étaient les obstacles qu'ils
offraient à surmonter pour en sortir ; mais je n'eus pas
plutôt mis le pied dans la tour intérieure que je pris la
résolution de tout entreprendre pour m'évader, et cela le
plutôt que je pourrais. Les combinaisons, la patience, le
travail, la hardiesse de mon évasion en plein jour et à main
armée, m'ont rendu ce qui s'appelle célèbre dans l'histoire
de Pierre-en-Cize : le château a été détruit en 1791 révo-
lutionnairement ; mais il est de fait que depuis 1777 jusqu'à
la démolition de cette forteresse, si l'on avait demandé à un
jeune prisonnier, ainsi qu'au grand Condé : « Voulez-
vous Y Imitation de Jésus-Christ », il aurait répondu, non
pas comme le prince : « Ouvrez-moi l'imitation de M. de
Beaufort»; mais, « donnez-moi l'imitation de Pontgibaud».
Tout est relatif, et pour un prisonnier de dix-huit ans, vous
allez voir s'il n'y a pas de quoi se vanter.