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ET LE BARREAU LYONNAIS 19 n'est plus beau que le rôle de ce défenseur convaincu, s'attachant à cet innocent ou à cet égaré contre toute la société qui l'accuse, le couvrant des plis de sa robe, s'épui- sant jusqu'à la plus extrême fatigue, se livrant jusqu'aux larmes pour sauver les trois plus grands biens de l'homme, la vie, la liberté, l'honneur. Humblot trouvait eh lui tout ce qu'il fallait pour ces grands débats criminels. Consciencieux à l'excès, il sentait mieux que personne la lourde responsabilité de sa noble mission et il s'y donnait tout entier. Ses études philoso- phiques et morales l'avaient bien souvent conduit à tra- vers les plus secrets sentiments du cœur humain et, lui enseignant la fragilité, lui avaient appris en même temps l'indulgence et la pitié. Enfin son improvisation se plaisait sur ce terrain facile qui la conviait à ses départs subits. On peut dire que ce fut là qu'il obtint ses succès les plus flatteurs. Et cependant on se tromperait étrangement en ne voyant dans Humblot qu'un orateur brillant, réservant les éclats de sa parole pour quelques procès retentissants. C'était en même temps un homme d'affaires consommé, un juriscon- sulte érudit, un esprit droit et précis, habile et juste à la fois, sachant jeter la lumière dans les dossiers les plus obscurs et les débrouiller aux yeux des magistrats avec une clarté limpide. Mais il ne pensait pas que la recherche et le charme de la forme pût nuire à la solidité d'un argu- ment et que l'affaire la plus technique et la plus ardue dût perdre quelque chose de sa force à être présentée sous des dehors plus attrayants. « Les habiles et les utiles » profes- sent trop souvent pour les élégances du langage un dédain d'autant plus méprisant qu'ils sont incapables d'y atteindre. Humblot les laissait dire et chaque jour leur prouvait que