page suivante »
72 CHATEAU-BAYART. On a exhaussé, et coiffé d'un toit conique en belles tuiles rouges, les deux tours d'entrée ; aux meurtrières en forme de croix, on a substitué de larges fenêtres ornées de persiennes vertes ; dans la tour de gauche, on a rétabli la chapelle; la tour de droite a été disposée de manière à servir d'appartement à M. le curé. Une vulgaire porte carrée que précèdent une mesquine grille de fer et un mur à hauteur d'appui a remplacé la porte ogivale. Quant au blason seigneurial, déjà mutilé par le marteau des van- dales de 1793, il a disparu sous le mortier d'un goujat de notre époque. Délivrée de ses herbes parasites et de ses débris sans nom, la cour est devenue un jardin où se mêlent les fleurs et les salades. Sur l'emplacement du vieux puits moussu, il y a une pompe à main. Sur le soubassement de l'une des vieilles tours est un kiosque chinois en bois et en paille. Réparé, Dieu sait comme, le vieux corps-de-logis sert de demeure à la famille du fermier. Bientôt aura disparu le reste de ces ruines ; alors tout sera dit, et le touriste pourra s'écrier : Consummalum est. Résignons-nous, ne pouvant mieux faire, mais en même temps consolons-nous ; car, en se ruant sur ce noble ma- noir, révolutions et restaurations n'ont pu lui ravir ni les souvenirs séculaires, ni le splendide panorama qu'il étale aux yeux du visiteur. La vallée du Graisivaudan est resserrée entre deux chaî- nes do montagnes dont les versants se cachent sous une végétation plantureuse qui, passant par toutes les teintes du vert émeraude au vert foncé, expire au pied des gigan- tesques rochers abrupts, derrière lesquels les cimes neigeu- ses des hautes Aïpes apparaissent dans un lointain va- poreux. Cette vallée est arrosée par l'Isère, qui, descendant avec bruit des glaciers où elle prend sa source, roule ses ondes capricieuses, tantôt bleues, tantôt grises, suivant la sai-