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LE PAGE DD BARON DES ADRETS SUITE (1). Si jamais une lionne fut furieuse en voyant qu'on lui avait ravi ses petits , si jamais une tigresse déchira la terre de ses ongles en trouvant vide l'asile de ses amours, si jamais l'aigle poussa un cri sauvage en voyant fracassés ses œufs, son espérance, leur colère cependant ne fut ni plus profonde ni plus terrible que celle qu'éprouva le baron des Adrets en recevant le rapport de ses envoyés. Il n'y avait plus à en douter, sa compagne, son amie, son page, que dis-je, sa fiancée, Marianne l'avait fui, lui qui aurait donné sa vie pour elle, lui qui près d'elle avait senti se calmer ses fureurs, lui qui d'une orpheline abandonnée voulait faire une dame grande, riche et puissante, l'égale des plus fières dames de la cour, lui qui avait cru à un amour partagé, à une affection sin- cère, à un dévouement vrai et solide, à un de ces atta- chements que la mort seule rompt et dissout. Et la perfide avait emmené avec elle ses compagnes; et toutes trois, jouant l'habileté des vieux soldats, riant de la vigilance des officiers, trompant toutes les consi- gnes d'une place de guerre, d'une citadelle redoutée, d'un fort gardé par l'élite de l'armée, étaient sorties tran- quillement , à l'heure et à l'instant qui leur avait con- venu, déguisées on ne sait comment, allant on ne sait (1) Voir les précédentes livraisons.