page suivante »
484 PIE n. Il nie semble que nous connaissons assez de côtés d'Jînéas Sylvius pour pouvoir le résumer et dire que ce fut un person- nage merveilleusement doté de talents divers, dont quelques- uns sont chez lui à un niveau supérieur. 11 ne faut pourtant point le ranger parmi ces génies hors ligne qui creusent le sentier par où passera la foule. Il n'y a rien d'initiateur dans sa manière ; il ne ressemble ni à saint Augustin, ni à saint Thomas, ni à ce que sera un jour Pascal. La pensée lui coûte trop peu, il écrit avec trop de facilité, et aborde trop de points différents pour être original sur aucun. Nul ne s'attache moins que lui à un système préconçu. Mais s'il n'a pas l'idée qui crée, il a au suprême degré l'idée qui naît de l'observation. S'il ne vous étonne pas par des traits de lumière partis d'en haut, il vous satisfait par la jutesse de ses vues, la perspicacité de son sens, la précision, l'exactitude de ses raisonnements. Ce n'est pas un esprit qui habite les hauteurs sereines de la méditation, c'est un esprit actif, fait pour le tourbillon de la vie réelle et dont la sphère est le mouvement. II lui faut de la besogne, et toute besogne trouve chez lui une aptitude. C'est ainsi qu'il a été poète, érudit, historien, ora- teur, grammairien, diplomate, critique ; c'est ainsi qu'il se trouvera à son heure un grand souverain. Rien ne lui est étranger. C'est l'homme le plus complet qui se puisse voir. Je ne m'arrêterai pas à plusieurs écrits contenus dans l'édi. lion Enricpetrina. Quelque puisse être îeur mérite, ils sont dépourvus de tout intérêt pour nous. Mais je ne puis passer outre sans faire une mention spéciale de la lettre ad Mahume- tem Turcorum principem. Cette lettre, eu égard à la circons- tance où elle fut envoyée, et au but que le pape s'y propo- sait, de convertir Mahomet, ne peut être considérée que comme une tentative suprême, tranchons le mot, désespérée, pour sauver la chrétienté menacée par les armes des Turcs. Mahomet est arrivé au faîte de la puissance et de l'ambi-