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ÉTUDE SUR LES GUERRES à E RELIGION, 31
Les catholiques n'en avaient pas de pareilles a leur dispo-
sition; précisément parce qu'ils composaient la nation, ils
eurent peine a se former en parti, et n'y réussirent jamais
qu'imparfaitement. Le roi et les autorités établies dans le
royaume, étaient leurs appuis naturels ; le jour où ces appuis
leur firent défaut, ils se résolurent lentement à ne compter
que sur eux seuls. Attaqués, ils devaient se défendre; or la
défense est toujours moins prompte et ordinairement moins
hardie que l'attaque. La tactique militaire et politique des
catholiques ne valut donc pas celle des protestants.
De plus, Dieu ne leur donna pas d'avoir dans leur sein
d'aussi grands hommes. Un seul était fait parmi eux pour
' égaler, pour surpasser peut-être tous ses adversaires : c'é-
tait François de Guise- Ce grand capitaine, qui avait sauvé
la France,se croyait destiné à sauver l'Eglise. Subordonnant
tout a ce dessein suprême, ardent a la lutte, impatient des
résistances, né pour commander el commandant par l'épée,
il n'était incapable ni de générosité, quand les mœurs d'une
époque impitoyable laissaient ouverture aux inspirations
propres de son âme, ni de modération quand l'intérêt de
sa cause demandait la modération. Mais il ne devait pas con-
duire longtemps les guerres de religion ; plus heureux, il ter-
mina dès leur début par une mort sainte une carrière héro-
ïque. Le fanatisme protestant inaugura sur lui l'assassinat
politique, et si ses enfants héritèrent de son rôle ils ne con-
tinuèrent pas sa gloire. Chez François de Guise, si grande
que fût l'ambition,la foi la dominait et sembla l'inspirer. Chez
ses fils, au contraire, le dévouement religieux paraît mis au
service d'une ambition qui ne connaît plus de frein, et dans
la mesure même où cette ambition personnelle s'élève et
s'emporte,le génie s'abaisse; c'est pourquoi chargés de con-
duire les catholiques ils se montrèrent en définitive, malgré
des qualités brillantes, inférieurs à leur tâche.