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482                          PIE   il.
  cette assemblée sont évidemment plus cultivés, ils ont puisé
  à la source des anciens, le goût s'est perfectionné, la langue
  est devenue meilleure, et quelques lettrés font entendre les
  accents d'un véritable talent oratoire. Mais la plupart se
  contentent de prononcer des discours écrils et retenus de
  mémoire. Ce n'est point encore là l'éloquence dont nous
  nous faisons l'idée. Celle-ci ne s'élabore point dans le si-
  lence du cabinet, à moins que ce ne soit pour l'élude du
  sujet; elle ne dépend pas de la mémoire, elle nait en face
 d'un auditoire prévenu ou sympathique, tranquille ou pas-
 sionné ; elle port, comme un trait, du mouvement que l'im-
  portance du sujet, la gravité des circonstances, l'enthousiasme
  ou la contradiction communiquent à une âme disposée aux
  fortes émotions.-C'est ainsi qu'elle nous apparaît chez les
  grands maîtres de la parole. C'est celle d'iEnéas Sylvius.
 Voilà pourquoi il sembla prodigieux aux regards des con-
  temporains qui l'entendirent.
     Du reste, l'Europe entière devint !e théâtre de son talent.
 Après Bille, Rome, Naples, Sienne, Milan, Pavie, Mantoue,
  Vienne, Ralisbonne, Francfort, Prague, retentirent succes-
 sivement de sa parole. C'était surtout l'orateur des Diètes,
 et il y obtint, à plus d'une reprise, de merveilleux triomphes.
 Je me bornerai 5 ciler celui de Ralisbonne. C'était après la
  catastrophe de Constanlinople ; il s'agissait de réunir l'Alle-
 magne dans une croisade confre Mahomet II. L'assemblée
 mal disposée avait déjà entendu plusieurs orateurs de renom
 sans se laisser émouvoir. iEnéas Sylvius prend la parole et
 opère un mouvement tel que le duc de Bourgogne, Philippe-
 le-Bon, qui assistait à la séance, s'écria comme hors de lui:
. « 11 n'est plus besoin de discours, iEnéas Sylvius vient de
 montrer suffisamment ce que nous devons faire. Libre à
  chacun de prendre le parti qui lui plaira, quant à moi,
 pourvu qu'un seul prince veuille me suivre, je suis résolu de