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364 LA CHANSON DE ROLAND. Un Sarrazin l'épiait faisant le mort parmi les autres. Voyant Roland sans mouvement, il se lève et veut s'empa- rer de ses armes. « A l'effort que fit le païen pour prendre ses armes, Roland s'aperçut de quelque chose et ouvrant les yeux, il dit: « En vérité, lu n'es pas des nôtres», et retenant d'une main l'oliphant qu'il ne veut point perdre , de l'autre il frappe sur le casque parsemé d'or du païen, fracasse les os de la télé dont il fait jaillir les deux yeux et abat le païen mort à ses pieds. » Alors il s'aperçoit que sa vue se perd ; il fait un dernier effort pour se mettre sur ses pieds. Devant lui se trouvait une pierre grise. Dans sa colère et son dépit, il la frappe de dix coups de son épée ; l'acier résonne, mais ne se rompt ni ne s'ébrèche. Ah ! dit le comte, aide-moi, sainte Marie. Ah! « Durandal que vous êtes malheureuse ! Je ne pense plus au « temps où vous m'avez si bien servi. II n'y a pas d'homme « qui n'ait fui devant vous ; un bon vassal vous a tenue long- « temps, el jamais il n'y eu! votre pareille en France. » « Roland frappa encore le perron de sardoine ; l'acier ré- sonna, mais ne se rompit ni ne s'ébrécha. Quand il vit qu'il ne pouvait briser son épée, il commença à se plaindre en lui- même : « Oh ! Durandal ! que tu es belle, brillante et claire ! « Comme tu reluis et es flamboyante au soleil ! Pour cette « épée, j'éprouve un chagrin et une douleur extrêmes ; mieux « vaut la détruire que de la laisser entre les mains des païens. « Oh ! Dieu, notre père, ne laissez pas tomber cette honte « sur la France !» « Roland se met encore à frapper sur une pierre grise dont il fait voler des éclats plus que je ne puis vous dire ; mais l'épée résonna, et loin de se briser rebondit vers le ciel. Quand le comte s'aperçoit qu'il ne pourra la rompre, il se met à la plaindre « Puis il sent que la mort s'empare de lui et descend de sa