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PROMENADE. 339 des livres entiers rendus au jour après un oubli dix-huit fois séculaire. Décidément, je "ne me sens pas la force de quitter cette ville dont on a dit : veder Napoli,poi mon, sans confesser le profond désappoinlement que j'ai éprouvé en constatant un fait éminemment regrettable, selon moi; je veux parler de la disparition presque complète des costumes nationaux dans Naples et ses environs. Pendant les quelques semaines que je venais de passer à Rome, j'avais été ravi de retrouver dans la ville et dans la campagne, surtout dans les belles montagnes de la Sabine, le respect et la conservation du costume traditionnel dont les salons de peinture nous donnent chaque année des centaines de spécimen. J'avais contemplé avec bonheur ces fiers cam- pagnards coiffés de feutres élevés, drapés dans leurs amples manteaux, aux braies en peau de chèvre toutes velues, et aux guêtres de cuir emprisonnant gracieusement leurs jambes ; ces contadines, la tête couverte du blanc lavoletto, ou la chevelure traversée par des poignards en guise d'épingles, la taille serrée dans un corsage de velours ou de drap qui surmonte.la jupe aux vives couleurs et le tablier bariolé. A Naples plus rien de cela ; si l'ensemble des mœurs a conservé une physionomie assez tranche'e, le costume, en re- vanche, a disparu. L'accoutrement traditionnel du lazzarone n'est plus qu'un souvenir ; cette classe pittoresque s'est mo- dernisée; elle semble une seconde édition des bons portefaix de la Cannebière. Elle ne se distingue plus que par le bon- net marin à la Masaniello, et encore n'est-il plus écariate ou bleu céleste comme autrefois, mais gris de fer ou marron foncé. Cela ne fait plus aucun effet dans le beau paysage du golfe. A la campagne, les contadins ont renié le costume que tant de siècles avaient respecté; vous chercheriez en vain