page suivante »
406 LE G0URGU1LL0N AU XIII e SIECLE. IV. Le pape quitta Lyon en 1251. Sa présence et son intervention avaient réussi à contenir momentanément l'animosité récipro- que des bourgeois et des chanoines ; mais, comme dit naïve- ment Paradin : « L'ulcère qui avoit si longuement attiré de si pernicieuses humeurs se rompit. » Les gens du Chapitre ayant fait quelques arrestations arbitraires, une insurrection générale éclata. Le peuple se porta sur le cloître de St-Jean, s'en empara et pilla les maisons des chanoines. Ceux-ci se réfugièrent dans le cloître de St-Just, muni d'excellentes fortifications qui pou- vaient défier les fureurs populaires. De leur côté, les soldats de l'église commettaient mille désordres dans les campagnes, dé- vastant et dévalisant les maisons des bourgeois. La guerre était donc déclarée de part et d'autre, accompagnée de toutes sortes d'horreurs. Cette révolte contre le pouvoir légitime du temps finit cepen- dant par le triomphe des idées, au nom desquelles elle avait été excitée. Elle institua et sut consolider le gouvernement consu- laire de Lyon, dont la durée de cinq siècles ne fut interrompue que par la révolution de 1789. Si nos aïeux ont fondé quelque chose de stable, c'est que leur sagesse les a garantis de l'impa- tience, et les a empêchés de démolir le lendemain ce qu'ils avaient édifié la veille. Le premier soin des bourgeois, après la prise de St-Jean, fut de barricader les rues. On voit que notre siècle n'a pas tout in- venté. Cependant quand on songe au pauvre moyen employé par nos pères, on ne peut s'empêcher d'avouer nos immenses progrès en ce genre. Les fréquentes et terribles barricades pa- risiennes de notre temps attestent un savoir faire très-perfec- tionné. Les chanoines, se plaignant des habitants de Lyon, dé- crivent ainsi, dans un latin peu cicéronien, ces mesquines entraves apportées à la circulation : in pluribus locis civitath lugdunensis erant catenœ, scilicet lapides angulares, habentes crochetos et anmdos ad affigendas catenas. Quelques chaînes