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S CESSY. Voila, cher Daviot, la retraite bénie Où je laisse couler le reste de ma vie. Jadis, des soins nombreux en agitaient le cours. Un peu d'ambition préoccupa mes jours. Sur la scène du monde, où tout cherche a paraître, Moi je voulus aussi, tant l'homme est peu son maître, Désertant la campagne et son calme enchanteur, Me montrer, a mon tour, frivole imitateur, Mais un amer regret suivit ma tentative, Et, du milieu des flots m'élançant vers la rive, Je regagnai des lieux restés chers à mon cœur, Lieux de repos, d'étude et d'innocent bonheur. Je n'en sortirai plus, et cet ami s'abuse Qui voudrait que Thémis vînt renchaîner ma Muse (1). Non ; quelque rang que m'offre entre les magistrats Un homme bienveillant que je n'oublîrai pas, Je veux vivre mon maître, et n'ai plus fantaisie D'entendre de forfait traiter la poésie. Je ne veux pas courber sous .un obscur niveau Un front où la pensée allume son flambeau. Quinze ans, le Code en main, j'ai poursuivi le crime; Mais moi-même j'étais sa première victime, Car de tant de noirceurs le spectacle odieux Oppressait mon esprit, désenchantait mes yeux. Enfin, tout m'a causé chagrin, inquiétude, Une chose exceptée, une seule, l'étude. Je veux donc sans partage en goûter les douceurs. Qu'on ne me parle plus ni d'emplois ni d'honneurs ; Je les souhaite à ceux qui, courtisans du monde. S'enivrent a la coupe où tant de lie abonde. Dédaignant les plaisirs du vulgaire troupeau. Moi, j'aime à m'abreuver à la source du beau, (1) M. Alcoock, conseiller à la Cour (le cassation.