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296 LA DIPLOMATIE FRANÇAISE EN ORIENT. Le premier jour de janvier 1540 , Charles-Quint recevait à Paris une splendide hospitalité du monarque qui n'avait trouvé , quinze ans auparavant , qu'une humiliante prison a Madrid. Cet acte de confiance magnanime d'une part, et de générosité chevaleresque de l'autre , eut un immense reten- tissement en Europe et rendit sensible, aux yeux de tous, une union politique, dont les témoignages s'étaient jusque-là renfer- més dans les arcanes de la diplomatie. Comme dans toutes les circonstances qui laissaient prévoir un rapprochement entre ces deux princes, lé contre-coup de cet événement se fit sentir à Constanlinople et réveilla les susceptibilités de Soliman. Ce fut pour Rincon l'occasion de nouveaux efforts d'adresse et de persuasion, afin de dissuader le fier et ombrageux Musul- man auquel il parvint à inculquer des idées plus saines sur les mobiles de la politique française ; on trouve la preuve de son succès dans ce qui se passa au sujet de la question vénitienne. La France, comprenant que la stabilité de la seigneurie comme état indépendant exigeait une prompte paix avec la Turquie, avait, malgré son premier échec, per- sisté à exercer son influence médiatrice dans cette affaire. Grâce à ses soins , la paix tant désirée fut conclue vers le milieu de 1540 ; elle inaugura , il est vrai , le déclin de la domination des Doges, en Orient, puisque leur gouverne- ment fut amené à consentir la cession des îles de l'Archipel ; mais elle fut, dans ce moment critique pour la seigneurie , un bienfait et une ancre de salut, dont tout l'honneur revint à FrançoisIer. Rincon donna, en réjouissance de celte paix, une fêle splendide dans sa résidence de Péra. Si le traité stipulé par-Rincon avait sauvé les restes de la domination vénitienne, là ne s'arrêtait pas toute sa portée ; il avait encore pour la France l'immense avantage de lui subor- donner une alliée inquiète et jalouse, dont le" dépit ne pouvait se dissimuler à l'aspect de la suprématie que prenaient