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                          BIBLIOGRAPHIE.                         241

justes, et que, dans leur sévérité à l'égard du présent, il y a
autant d'ignorance que d'ingratitude. Sans doute on a quel-
quefois exagéré, dans un esprit de parti, les souffrances du
servage et la pesanteur du joug seigneurial; mais en réduisant
les choses à la vérité, aux faits positifs dont M. Dareste trace
le tableau avec l'impartialité la plus scrupuleuse, il en reste
assez pour nous inspirer une profonde reconnaissance envers
ce Dieu qui, de l'esclavage antique, à travers tant de révo-
 lutions diverses, a graduellement amené nos générations à
 un état social si doux. S'il y a encore des misères, comme il
 y en aura sans doute toujours, en quoi peuvent-elles être com-
 parées aux misères de nos pères? Voyez, au XIesiècle,
 ces vingt-six famines bien comptées qui ravagèrent la France,
 et, même sous LouisXIV, celte année 1662 qui détruisit des
 villages entiers dans toutes les contrées au nord de la Loire;
 voyez ces paysans vêtus de peaux jusqu'au temps de Me de
 Sévigné, ou de ce sayon grossier, don t de vieilles peintures nous
 ont conservé le dessin ; songez surtout à cette absence complète
4e loute sécurité pour les faibles, qui est le trait distinclif de
 toutes ces sombres époques. Quant à l'état moral de ces popula-
  tions si misérables, il serait facile d'en tracer d'aussi tristes ta-
 bleaux. Leseul fait de la servitude ne devait-il pas entraîner, là
 comme ailleurs, ses déplorables conséquences ? Repoussons
  donc de l'histoire descampagnes, comme on la repousse de tant
  d'autres côtés, cette doctrine de la décadence que des docteurs
  sans mission prêchent à notre société découragée. G'étaitpour-
  lanldanslhistoire des campagnes qu'elle croyait sa position in-
  expugnable : M. Dareste nous prouve qu'elle ne peut pas plus
  s'y maintenir qu'ailleurs. Oui, le progrès n'est pas un rêve am-
  bitieux; il est un fait palpable, et aussi vrai pour l'état ma-
  tériel et moral de nos populations agricoles que pour la sci-
  ence de nos académies el l'industrie de nos ateliers. 11 ne
  s'est peut-être pas accompli d'une manière continue ; mais, en
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