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RESTIF DE LA BRETONNE. 229 qui est souvent cité, avant d'être M. Arthaud, avait été Labruyère, Ronsard, Clément V et Glovis. Marie-Antoinette avait été Brunehault ! La plume se refuse à remuer cette accumulation de choses absurdes ou dégoûtantes. C'est à la fois le langage des mau- vais lieux et des petites maisons. Restif se déchaîne contre le célibat, et il avait de bonnes raisons pour haïr la virginité; sur les Jésuites, et en fait d'insinuations calomnieuses, il d é - passe les pamphlétaires de notre temps. Il prône les livres erotiques comme indispensables à une bonne, éducation; en fait d'histoire naturelle, il donne une âme à la matière et des organes aux comètes ; quant à l'homme, il se réunit à quelques matérialistes pour en faire un produit successif du singe et du chien. Le héros de ce livre est un personnage imaginaire qu'il nomme le duc Multipliandre, nom heureu- sement trouvé, car ce héros a le pouvoir d'engendrer à l'in- fini, d'entrer dans les corps en en chassant les âmes (je crois ce trait emprunté a quelque conte oriental). Cagliostro figure aussi; celui-là n'est pas déplacé; il parle môme de Jésus- Christ, Proh Pudor ! qu'il nomme Jésuah et qu'il fait venir des amours du soleil et d'une planète ! Voici encor du Fourrierisme ; Fourrier n'a pas le mérite, assez stérile, d'avoir inventé, il n'a fait que mettre en ordre des folies antérieures ; dans le pays peuplé et régi par le duc Multipliandre, au bout de trois mille ans, la terre devient un séjour enchanté ; les glaces des montagnes et des pôles sont fondues, sauf celles que l'on tient en réserve pour boire frais; deux lunes sont chargées de l'éclairage des nuits (Fourrier a renchéri là dessus et en octroyé sept à ce que je crois); les animaux malfaisants disparaissent, la nature est corrigée, les pôles sont habitables, la mer est excellente à boire. On voit pousser des fruits nouveaux et apparaître de nouvelles espèces d'animaux, composés d'aggrégations disparates. Au milieu de