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58 SOCIÉTÉ PROTECTRICE DES ANIMAUX. notre compagnon sur la route de l'éternité ; qu'il a le premier des droits à nos soins et à notre attachement. Si la dureté à l'égard des animaux révolte le sentiment de jus- tice déposé au cœur de chaque homme, notre indignation n'est pas moins excitée par cette sensibilité outrée qui nous fait oublier la dignité humaine, et perdre de vue la véritable destination des animaux. Les personnes atteintes de cette tendresse ridicule sont souvent injustes Wégard de leurs semblables. Il n'est pas rare de voir un malheureux repoussé brutalement de la maison où le carlin, malade d'indigestions successives, ne peut plus avaler le biscuit trempé dans le café de sa maîtresse. Nous repoussons de toutes nos forces cette aberration du sen- timent moral. Cette sensiblerie qui étouffe la véritable compas- sion, a été stigmatisée par Gilbert. Qu'il me soit permis de vous rappeler ici ces vers d'un poète aussi célèbre par son infortune que par sa verve : Parlcrai-jc d'Iris ? chacun la prône et l'aime. C'est un cœur, mais un cœur... c'est l'humanité même ; Si d'un pied étourdi quelque jeune éventé Frappe, en courant, son chien qui jappe épouvanté, La voilà qui se meurt de tendresse et d'alarmes ; Un papillon souffrant lui fait verser des larmes, IJ est vrai ; mais aussi qu'à la mort condamné, Lally soit en spectacle à l'échafaud traîné, Elle ira la première à cette horrible fêle Acheter le plaisir de voir tomber sa tête. GILBERT. 11 est évident, d'après ce que nous venons de dire, que nous demandons pour les animaux ce quenous exigeons pour l'homme, justice et compassion. Nous ne voulons pas, à l'instar des bigots indiens de Surate, établir des hôpitaux pour des rats et pour des insectes. Afin d'être justes envers les animaux domestiques, nous ne devons pas être injustes envers les hommes chargés de les soigner et de les gouverner. Les hommes nous présentent de grandes va- riétés individuelles sous le rapport du caractère et de l'intelli-