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                          CESSV.                              9

Je pense, je travaille à devenir plus sage,
Et prépare mon âme au terrible passage.
Heureux qui, près d'entrer dans l'obscur avenir,
Peut laisser de lui-même un léger, souvenir !

Bosquets qui m'êtes chers, retraite fraîche et sombre,
Sur mon front qui s'incline épaississez votre ombre.
Contre l'ambition, vautour intérieur,
Contre l'envie encor défendez bien mon cœur;
Avec ces passions peut-on vivre tranquille'?
Mais laissez l'amitié visiter cet asile ;
Laissez venir à moi ceux qui sont indulgents,
Simples, affectueux, en un mot, bonnes gens,
Ceux sur qui les grandeurs n'exercent point d'empire.
Ils me plaisent, près d'eux largement je respire.
De l'hôte de Tibur je n'ai point les talents,
Mais ses goûts sont en moi : comme lui, rat des champs.
Je préfère à l'éclat des royales demeures
Un petit coin de terre où vous bercent les heures ;
J'y trouve oubli des maux, liberté, doux sommeil ;
Tous les palais du monde ont-ils rien de pareil ?
Venez donc au plus tôt dans ce pays que j'aime.
Du tableau que j'ai fait voir l'original même,
Et pour vous assurer si j'ai bien peint Cessy,
Séjournez-y longtemps : on juge mieux ainsi.

                                   Eu.   SERVAN DE   SUGNY.