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 dédaigneusement rebuté ses caresses, ou repoussé ses
 avis?
    Un religieux , sous le nom de Correcteur, avait leur direc-
 tion. Avec l'agrément des parents, il envoyait à la maison de
 Sainte-Colombe-lès-Vienne ceux dont l'indomptable fougue,
 contrariait les progrès des moins indisciplinés (1).
     (1) Les vieillards ont entendu raconter une anecdote assez piquante et
  qui fit grand bruit dans le temps.
     Une dame , richement vêtue, arrête son équipage à la porte d'un maga-
  sin de notre ville, où elle fait des emplettes considérables et demande à
 être accompagnée chez elle, pour en compter le prix. Tout joyeux de l'au-
 baine, le chef fait monter son fils, jeune homme de vingt ans , dans le ca-
 rosse de l'inconnue. —Cocher, à Vaise , dit-elle. Et dans un instant le pont
 de Pierre est traversé, Bourgneuf parcouru; l'on arrive à l'Observance. La
  dame témoigne le désir de voir , en passant, le P. Gardien , vieil ami de sa
 maison. Le jeune homme veut s'informer, descend, sonne au portaih Le
 Frereportier reconnaît la dame qui, restée dans la voiture,feignait d'attendre
 la réponse. En un même instant, le carosse part comme un trait, et deux
 robustes Frères se saisissent du jeune homme , et malgré ses cris , l'entraî-
 nent au fond du cloître. Il a beau résister , protester : —Nous avons des or-
 dres ; — crier : Au voleur ! — Nous sommes avertis, votre mère a tout dit au
 P. Gardien. — Ma mère est morte , j e suis le fils T . , rué P. , n° . . . , l'on me
 vole. Mon argent ! mou argent ! — Nous ne serons pas dupes de vos hypo-
 crisies. — Mais elle emporte dix mille francs à mon père. — Voyez l'astu-
 cieux ! comme il tourne joliment un mensonge ! Tout en dialoguant de la
 sorte , ils traînent de force le pauvre captif au P. Michel Duby, qui, la.
veille, avait été prié par l'inconnue de recevoir chez -lui, pour trois mois, son
fils , son fils indocile , menteur , emporté. Le Gardien essaie d'abord de le
ealmer ; sans trop écouter ses dires, il lui promet tous les ménagements
compatibles avec les règlements de l'asile. Ces douces paroles ne font qu'ir-
riter le prisonnier. II décline une seconde fois son nom , verse des larmes,
mais des larmes de rage. Ordre de le fermer dans une des cellules. Sa fureur
est au comble. Pourtant, le P. Duby qu'étonne une résistance aussi prolon-
gée , soupçonnant quelque ruse , va lui-même s'informer au domicile indiqué
par le jeune homme. La vérité se découvre. La mère prétendue n'est
qu'une adroite voleuse. Le père arrive en toute hâte , retrouve , embrassé
son fils et reconnaît, en même temps, l'astucieuse fourberie dont ils vien-
nent d'être tous les deux les déplorables victimes.