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U 284 N RÉVEILLON DE NOËL A ce moment, un obus, puis un second, lancés de plein fouet, et partis des mêmes tranchées, pénètrent dans la maison par la toiture et éclatent dans les greniers. Plus de doute. Nous sommes visés. De leurs observa- toires, les Allemands ont remarqué pendant le jour un mouvement de troupes dans la cour ouverte du cantonne- ment. Peut-être des mobiles, enchantés d'être si bien logés, se sont attardés aux fenêtres des étages supérieurs pour voir le paysage et se sont trouvés devant l'objectif des lunettes allemandes. Les artilleurs ennemis ont pris des points de repaire, réglé leur tir pendant le jour, afin de surprendre, la nuit, les habitants de la maison dans leur sommeil. Mais les mobiles sont déjà sur pieds. Quelques-uns crient par les fenêtres que le feu est dans les combles. Ge sont des obus incendiaires que nous lancent les Allemands. Ces engins sont garnis de petits tubes de métal contenant une matière inflammable, une sorte de feu grégeois qui, lancé par l'explosion sur les poutres, les par- quets et les boiseries, s'y attache et ne tarde pas à y mettre le feu. On escalade l'escalier. On se précipite aux greniers pour tâcher d'éteindre le commencement d'incendie, mais les flammes dévorent une grosse poutre, ont percé la toiture et s'élèvent déjà dans l'air au-dessus de la maison. Dès lors, il n'y a rien à faire, car les Allemands avertis du succès de leur tentative vont redoubler le tir, de façon à rendre impossible et trop dangereux tout secours contre l'incendie qu'ils ont allumé. Et en effet, les obus se succèdent maintenant sans relâche, et arrivent même plusieurs à la fois. L'un d'eux brise le ciel ouvert de l'escalier, et les éclats de verre projetés en tous sens blessent plusieurs hommes- On se hâte de jeter