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246 UNE NOUVELLE BOUTIQUE demeurer à Lyon » ils ont violé et violent l'une des lois fondamentales du royaume, — parce que leur présence sur le pont, en plein « cœur et milieu de cette ville » est un scandaleux défi à la foi chrétienne du peuple lyonnais. Chassez-les. Car, si jamais, en un jour de malheur, l'in- terdit qui tient ceux de leur race hors de France venait à être levé, qui peut douter que de toutes parts aussitôt nous les verrions accourir et s'abattre en nos meilleures villes comme des nuées de vautours Et, une fois chez nous, — à moins que nous ne les enfermions dans des ghettos, que nous ne leur fassions porter la rouelle, que nous ne prenions contre eux mille précautions, — qu'y aurait-il qui pût nous surprendre s'ils bâtissaient, en quelques années, d'énormes fortunes à nos dépens, s'ils se servaient de leur or pour séduire les âmes>frivoles, si l'impiété et la corruption s'in- troduisaient par eux à la cour et jusque dans les conseils de nos rois ? Qui sait même si un moment ne viendrait pas où de nouveaux Manassès de Veson, de nouveaux docteurs Sédécias seraient, ô honte ! les maîtres de nos maîtres ; où derechef les pasteurs du peuple chrétien auraient à gémir, comme autrefois Agobard, sous l'étreinte d'un gouverne- ment doux aux impies, dur aux chrétiens parce que ce serait celui de la Juiverie et que jamais, tant que le Juif sera le Juif, la haine du « Nazaréen » ne cessera de faire, avec l'amour de l'or, le fond de son cœur ?' Les magistrats auxquels s'adressaient ces paroles n'étaient guère moins antisémites que celui qui les prononçait. Acte fut donné par eux à Me Estienne de sa « requête » à fin d'expulsion des Juifs en même temps que de sa « remon- trance » tendant à l'arrestation des rôdeurs de nuit, avec prise de l'une comme de J'autre en très sérieuse considéra- tion.