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                            « MIRABEAU »                    265

retrouver son orateur placé sur un vaste théâtre et passionné
pour de plus grands intérêts. Les Etats Généraux étaient
convoqués, la noblesse de Provence contestait au comte de
Mirabeau le droit d'être admis à ses assemblées. Le fou-
gueux persécuté répondait en se comparant au dernier des
Gracques immolé par les Patriciens, attestant avant sa mort
les Dieux vengeurs et lançant vers le ciel la poussière d'où
devait naître Marius ; « Marius moins grand pour avoir
« exterminé les Cimbres que pour avoir abattu dans Rome
« l'aristocratie de la Noblesse ! »
     « Marius et les Cimbres ! Rome et les Gracques !
«    reprend M. Rousse, c'étaient sans doute de bien grands
«    noms ; et ces dignes magistrats du Parlement de Pro-
«    vence, ces honnêtes gentilshommes d'Ollioules et de
«    l'Esterelle, qui s'étaient montrés un peu durs pour Mira-
«    beau, ne ressemblaient guère aux « Patriciens » ni aux
«    Pères conscrits de la Grande République... personne, à
«    Aix, ne parlait d'immoler a à l'aristocratie de la Noblesse
«    cette autre victime ».
    « Mais ces images grandioses et ces mots sonores, en
«   passant sur la plèbe tumultueuse de la vieille Province
«   romaine, y réveillaient les souvenirs confus de son
«   antique origine, dont la tradition populaire et les légendes
«   avitines avaient conservé vaguement la mémoire. Ils
«   faisaient revivre dans ces têtes ardentes la vision soudaine
«   des grands ancêtres d'Italie, dont tant de monuments
«   encore debout dans les campagnes attestaient la puis-
c
e   sance, et dont les filles d'Arles et de Beaucaire gardaient
«   sur leurs traits l'inaltérable beauté. »
  « On sait, ajoute M. Rousse, par quelle chicane de pro-
« cédure féodale cette noblesse respectable et bornée se
« débarrassa de Mirabeau, l'exclut sans retour de ses
    N° 4. — Octobre 1891.                               m