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avec une vigueur d'observation qui les fait revivre, et sur-
tout il ressuscite pour eux les traits, l'attitude de chaque per-
sonnage et enfonce dans leurs imaginations ce portrait
désormais ineffaçable. La peinture et la gravure nous ont
rendu familière l'image de Mirabeau congédiant le marquis
de Dreux-Brézé. Dès la première page, M. Rousse nous fait
voir les deux représentants du peuple et du roi et leur ren-
contre historique. Sa plume a l'éclat du pinceau, avec la
netteté du burin. Voici bien Mirabeau, « l'orateur encore
« debout, saisi et retenu tout entier » (2) :
    « Ce bras étendu, cette main menaçante, cette grosse
«   tête poudrée, ces grosses lèvres bouffies d'éloquence, ce
«   gros corps planté fièrement ; cette laideur tumultueuse et
«   trapue enfoncée dans les plis corrects de l'habit à la
«    française, relevée par l'extravagance pompeuse de la
«   coiffure à la mode, et prenant dans ces atours solennels
«   je ne sais quelle majesté emphatique, colossale et bizarre;
«   c'est ainsi que cette image était restée dans ma mémoire,
«   comme le pendant démocratique de Louis XIV entrant
«   tout botté dans la Grand'Chambre du Parlement. »
   « Ajoutez à ce tableau la figure élégante et frêle du
« marquis de Dreux-Brézé dans son costume de Cour, avec
«  le chapeau à plumes et les talons rouges, s'effaçant
«  devant l'habit noir du Tiers-État comme le fantôme de
«  la royauté devant l'apparition soudaine du peuple. »
   M. Rousse nous a expliqué comment il a été conduit à
étudier d'abord Mirabeau dans ses ancêtres :
   « Je ne crois, dit-il, ni aux fatalités héréditaires, ni aux
« destinées inévitables. Chacun répond de soi dans ce


  (2) Expressions empruntées à M. Rousse. Préface aux Plaidoyers et
Discours de Choix d'Est-Ange.