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260 « MIRABEAU V > avec une vigueur d'observation qui les fait revivre, et sur- tout il ressuscite pour eux les traits, l'attitude de chaque per- sonnage et enfonce dans leurs imaginations ce portrait désormais ineffaçable. La peinture et la gravure nous ont rendu familière l'image de Mirabeau congédiant le marquis de Dreux-Brézé. Dès la première page, M. Rousse nous fait voir les deux représentants du peuple et du roi et leur ren- contre historique. Sa plume a l'éclat du pinceau, avec la netteté du burin. Voici bien Mirabeau, « l'orateur encore « debout, saisi et retenu tout entier » (2) : « Ce bras étendu, cette main menaçante, cette grosse « tête poudrée, ces grosses lèvres bouffies d'éloquence, ce « gros corps planté fièrement ; cette laideur tumultueuse et « trapue enfoncée dans les plis corrects de l'habit à la « française, relevée par l'extravagance pompeuse de la « coiffure à la mode, et prenant dans ces atours solennels « je ne sais quelle majesté emphatique, colossale et bizarre; « c'est ainsi que cette image était restée dans ma mémoire, « comme le pendant démocratique de Louis XIV entrant « tout botté dans la Grand'Chambre du Parlement. » « Ajoutez à ce tableau la figure élégante et frêle du « marquis de Dreux-Brézé dans son costume de Cour, avec « le chapeau à plumes et les talons rouges, s'effaçant « devant l'habit noir du Tiers-État comme le fantôme de « la royauté devant l'apparition soudaine du peuple. » M. Rousse nous a expliqué comment il a été conduit à étudier d'abord Mirabeau dans ses ancêtres : « Je ne crois, dit-il, ni aux fatalités héréditaires, ni aux « destinées inévitables. Chacun répond de soi dans ce (2) Expressions empruntées à M. Rousse. Préface aux Plaidoyers et Discours de Choix d'Est-Ange.