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56 BÉRENGER DE LA TOUR études à Toulouse. On sait, par la dédicace, de son Amie Rustique, à M. Albert, seigneur de Saint-Alban, qu'il étudia le droit, pour remplir, selon le vœu de ses parents, un emploi dans la magistrature ; mais il ne cessa point de donner une part de son temps à la muse. Cette maîtresse, d'ordinaire si jalouse, s'accommoda de ce partage et combla Bérenger de ses faveurs. Il passa quelques années à Bor- deaux et à Paris, et la fréquentation de Clément Marot lui inspira un goût extraordinaire pour la poésie. Dans Y Amie des Amies, nous voyons qu'il s'était lié d'amitié avec Antoine du Moulin, Charles Fontaine, Guillaume de la Perrière, Laurent de la Gravière et tous les poètes de l'époque. « C'était un des plus beaux génies de son siècle et des « mieux nés à la poésie héroïque, et, en tout ce qu'il tenta '( et en tout ce qu'il accomplit, ses desseins étaient nobles « et ses imaginations relevées ; et, s'il eust aussi bien vécu « sous le reigne de Louis XIV que sous le reigne de Fran- « çois I er , c'est-à -dire au temps de nostre langue épurée, « je m'assure tant de la bonté de son esprit que le beau « tour du vers et que la belle diction eussent bien fait « paroistre davantage la fécondité de ses pensées. « L'estude des lettres humaines estoit sa plus douce et « sa plus ardente passion ; jusque-là mesme que pour « enrichir sa langue des despouilles des langues étran- « gères, il se rendit si familières les langues grecques et « latines et l'italienne mesme, que l'on en voit esclatter « mille beaux traits dans ses escrits (8). » Bérenger de la Tour était à Bordeaux un peu après la terrible émeute des Gabelles, en 1548. Il quitta cette ville (8) Guill. Colletet. VU des poètes français,