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398 Rêvant une croisade aux cèdres du Liban, Où Selve par la gloire ennoblit le turban ! Adieu l'hymne de guerre au refrain électrique ! Sur l'échelle du pont, nilomètre historique, On court, l'œil inquiet, consulter le niveau; Le fleuve monte encore, il monte de nouveau, Dépasse la hauteur des plus anciennes crues, Franchit nos parapets, s'élance dans nos rues, Envahit l'humble échoppe et le splendide hôtel, Et baigne de sesflotsles marbres de l'autel. Fléau dévastateur, que la mort accompagne, Il s'étend dans les prés, il couvre la campagne. Sur ces fertiles bords, des touristes aimés, Où sont-ils ces hameaux comme desfleurssemés, Ces sites enchanteurs, ces gracieux villages Que le Saule argenté voilait de ses feuillages? Cormoranche, Thoissey, Vésine, Saint-Romain, Fleurville dans les airs suspendant un chemin, Montmerle au vieux clocher, Farges aux maisons blanches, L'onde a tout balayé : ses jaunes avalanches Entraînent pêle-mêle arbres, chaumes, lambris, Récoltes de l'années ; et parmi ces débris, L'œil, avec épouvante interrogeant l'espace, Croit distinguer parfois un cadavre qui passe, Et contempler au loin, dans sa morne terreur, Le tableau du déluge et ses scènes d'horreur. Oh! comment dérouler cette affreuse peinture? Ces champs dont j'admirais l'opulente culture N'offrent à mes pinceaux que de ternes couleurs. Partout le désespoir et partout les douleurs ! Le tocsin frappe l'air de ses sons lamentables ; D'affreux mugissements s'échappent des étables. Le curé du hameau, bon prêtre aux cheveux blancs, Nuit et jour au milieu des villageois tremblants, Seul montre un front serein à la foule égarée. Les uns, prêtant l'oreille à sa voix vénérée, Se courbent sur la rame, et guidant leurs bateaux, Déposent leurs trésors au penchant des coteaux ; Les autres s'ecriant que c'est leur dernière heure, Que l'Ange de la mort frappe à chaque demeure, Sous l'ivresse du vin étouffent leur raison, Tandis que, récitant la pieuse oraison, Les femmes, sur leur sein pressant un scapulaire, Invoquent à genoux la vierge tutélaire