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184 Lâj c'est l'insurrection (11 novembre), au milieu de Saint- Etienne, malgré le développement d'une force imposante. En vain le drapeau rouge est déployé, la loi martiale est pro- clamée, la sédition marche la tête haute et menaçante. M. de Curnieux, commandant les dragons (garde nationale à che- val), croit l'apaiser en faisant retirer sa troupe. Le peuple se rue aussitôt sur le corps-de-garde. Les hommes du poste sont désarmés et maltraités. Un citoyen recommandable par ses vertus publiques et privées, M. le baron de Rocha- taillée, commandant de la garde bourgeoise, est foulé aux pieds et mutilé. Le misérable, cause de ce déplorable événement, un nom- mé Odde, ouvrier sur le fer, et connu par l'exagération de son langage, avait été conduit dans les prisons de Monlbrison pour avoir cherché à troubler la tranquillité publique; ramené en triomphe par la populace de St-Etienne, qui se recruta en che- min de tout ce qu'elle rencontra sur son passage, il fit son entrée dans la ville, au bruit d'une décharge de mousque- terie. De toutes parts le mépris des lois, le soulèvement des basses classes, l'effroi des gens paisibles, l'émigration des hommes timorés, et, à la suite, tous les fruits des mauvaises passions. 1791. Les classes éclairées n'ont cependant pas encore perdu tout courage et toute influence. La nomination de M.Jo- •vin-Molle, comme député à la législative, choisi parmi les hommes les plus recommandables de la cité, annonce que tous les bons citoyens ne se sont pas encore retirés de la lutte. Le dévouement à la chose publique se trouve encore dans bien des âmes. De jeunes volontaires, sortis de tous les rangs de la société, se présentent avec ardeur pour concourir à la défense de la patrie. Un bataillon de 600 hommes se forme et part de Saint-Etienne, au chant de îa Marseillaise, sous le commandement du colonel Vabre. Parmi eux se trouve le jeune Ranchon, qui reviendra un jour avec le grade de major et la réputation d'un excellent militaire.