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    n'ont jamais rien fait dans sa ferme; et sa femme, pour
    sauver sa dot, s'est séparée de biens, puis de corps. Plus tard,
    on l'a trouvé, lui recors, mort ivre dans la neige, une con-
   trainte à la main. On a dit, à son enterrement, pour le repos
   de cette ame dont chacun désespérait, une messe bien basse,
   d'autant plus basse qu'il a discuté,â chaque baptême d'enfant,
   le tarif de la marguillerie, en vertu du concordat de germi-
   nal an X!!
      Voilà le commencement et la fin de notre héros, les pre-
  miers et les derniers actes de sa vie privée. Quant aux temps '
  intermédiaires, à son existence d'avocat, en parlant de son
  confrère, c'était parler d'Abel ; venons à Caïn maintenant.
      Tracassier toute sa vie, il n'a jamais été en charge dans
  sa Commune. Seulement au moindre événement politique,
  on l'a vu courant au clocher pour y sonner le tocsin, et à
  lui tout seul se nommer maire ou percepteur ; il facilite
  bien les arrangements de famille, mais par la terreur de son
  nom.Ce nom est une menace, une quasi déclaration de guerre,
  c'est l'alliance Anglo-russe quant à la France.
     Lorsqu'il avait intacte la dot de sa femme et sa légitime
 en débris, il les employait à acheter des droits litigieux qu'il
 rendait plus litigieux encore. Une fois ruiné, il s'accroche à
 tous les déconfits, les faillis, les séquestrés. Il sait faire re-
 vivre la dette éteinte ; éteindre celle qui vit, chose que Dar-
 gentré proclame une ressource impie ; la prescription, il la
 cultive, la propage dans son endroit. Dépourvu de l'in-
 telligence de son confrère et n'étant pas né aussi praticien
 que lui, il l'est devenu par une voie singulière. A force de
forger on devient, dit-on, forgeron; mais c'est sur lui qu'on
a martelé. Le cours de procédure qu'il a fait lui a été lourd
et dispendieux. La lente expropriation de ses biens, ses actes
frauduleux tant de fois annulés, lui ont inculqué le texte et
la glose de manière à le rendre retors au delà de ses propres