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390 essentiellement Bénédictin par l'extrême simplicité de ses ma- nières, comme par son goût décidé pour l'archéologie et la bi-^ • bliographie. Il avait entrevu les Prost de Royer , les Nonnote, les Poivre de la Fréta, les Mathon de la Cour et toute cette brillante société de notre ville déjà inclinée vers le fer de 1793 ; mais son élément à lui, c'était la savante poussière qu'on sou- lève en remuant les livres. Jeune encore, il connaissait les de- hors de tous, et possédait le contenu d'un très-grand nombre. Cependant le souffle de la tempête révolutionnaire vint le chasser d'une atmosphère toujours sereine pour lui. Le voilà avec un havresac qui traverse les Alpes. Il verra les bords de la Grèce, l'Espagne dont la vieille gloire lui apparut pâlissante, Rome où, après la bibliothèque du Vatican, son attention se fixa de préférence sur la remarquable physionomie des porte- faix de Transtevère; mais notre voyageur n'avait rien absolument de byronien; jamais aigri par l'adversité, il allait mangeant le pain de l'hospitalité, bénissant le Seigneur, et partout disant son mot admirable de naïveté et de belle humeur. Quand Napoléon songea à établir des facultés de théologie, l'abbé Chouvi qui était rentré en France fut porté à celle de Lyon par l'influence de Pouyart, son confrère. Il fut nommé le 9 décembre 1809. C'était bien, à raison de ses connaissances étendues, l'homme qu'il nous fallait pour renouer le fil tropévi. demment rompu de l'érudition ecclésiastique ; mais on peut dire que, par sa modération, sa modestie, son inaltérable sérénité d'ame, par ce laisser-aller de bonhomme d'où il ne sortait jamais que pour obliger, ce prêtre respectable convenait surtout à une époque dont les haines avaient été attisées et les préventions soulevées par tant de réactions successives. Sans se piquer d'une immense philosophie, l'abbé Chouvi croyait aux destinées favorables de l'humanité parce qu'il croyait à la provi- dence. La droiture de son ame lui faisait pressentir que toutes les tendances bienveillantes ; toutes les idées honorables qui a- vaient été violemment aliénées les unes des autres par une science incomplète, se rapprocheraient un jour d'elles-mêmes* r e t qu'alors, la pensée religieuse et la philantropie, éclairée pa l'expérience, viendraient s'embrasser comme des sœurs.