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leur du peuple-dieu ? ne craignez-vous point que votre cons-
cience bourrelée ne vous fasse sortir le sang par tous les pores ?
ne craignez-vous point que mes cendres ne vous glacent un jour
d'effroi et ne vous fassent tomber de stupeur? Le jour peut-être
n'est pas loin. Tremblez! vous avez condamné un homme ver-
tueux, juste, bienfaisant, un patriote, enfin un fier républicain.
Cet homme, c'est moi... Je ne crains pas la mort; je m'y suis
préparé dès le jour que les serres aristocratiques m'ont ravi à
la liberté, pour laquelle je vais expirer.
    « Tremblez, tremblez, tous autant que vous êtes^ craignez
le retour de Mâtine -, vous l'accélérez par vos crimes.
    « Que je suis content de mourir pour une aussi belle cause !
je porte tout le monde dans mon cœur. Vous-mêmes qui êtes
des monstres, vous qui m'assassinez avec des formes judiciaires
 que vous avez violées, je vous plains.
    « Vous me verrez aller à l'échafaud .comme un jeune homme
 vigoureux va à la noce •, mais celte bien courte jouissance sera
 pour vous la dernière.
    « Chalier ne vous demande qu'une chose, non pas de revenir
 sur votre jugement, mais bien de lui accorder la satisfaction
 de voir pendant le peu de momens qu'il a à vivre son cher dé-
 fenseur et sa vertueuse gouvernante, un ami et un confesseur
 pour épancher son ame dans la leur. »
    Ces dernières paroles, prononcées avec énergie, en imposè-
 rent un instant à l'auditoire, mais bientôt les huées recommen-
 cèrent; Chalier fut reconduit dans sa prison, où son défenseur^
  sa gouvernante et quelques amis l'accompagnèrent : là, froid et
 tranquille, il les rassure et les console. Assis au milieu d'eux., il
  écrit ses dernières dispositions avec la plus grande sérénité.
  Voici comment l'abbé Lasausse, vicaire de la métropole., chargé
  de l'assister à ses derniers momens, rend compte de sa mission :
     « Le 16 juillet 1793, l'an II de la République une et indivi-
  sible , je me présentai à midi au citoyen Joseph Chalier ; il avait
  été condamné à perdre la vie dans le jour. Citoyen Chalier, lui
  dis-je en l'abordant, je ne viens point exercer sur votre cons-
  cience un empire tyrannique ; je viens auprès de vous comme
  ami de l'humanité, comme votre frère. Vous êtes malheureux,