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avant sa mort était augmentée'par le séjour du duc de Mayenne , frère utérin de
son concurrent, et dont la présence lui était devenue infiniment suspecte sur ce
point; n'apercevant enfin à l'avenir que des désordres encore plus tristes par la
malheureuse pente que prenaient les affaires, une sombre tristesse s'empara de
son esprit; il tomba malade, sur la fin du mois d'octobre , d'une colique accom-
pagnée d'accident de fièvre, et la goutte en même temps le saisit en une main;
il ne céda à la maladie que jusqu'à ce que la nuit du dimanche 13 novembre
une dissenterie le pressa si fort, que le vendredi suivant avant le jour il sentit
ses forces bien affaiblies. Voyant alors la mort venir à lui, après avoir reçu les
sacremens de l'église, il consola sa femme, pria le père Emond Auger, jésuite ,
son confesseur, de représenter au roi qu'il mourait endetté pour son service , et
ayant fait appeler les échevins, leur recommanda sa femme , les priant de ne pas
permettre que ses créanciers fissent vendre ses meubles et effets dans la place
des Changes; il fit la même prière aux chefs des nations commerçantes dans
Lyon. Le samedi au soir, il reçut l'extrême-onction, et après l'avoir reçu, il
s'adressa à Dieu à haute voix., et le pria de le laisser au monde encore quelques
 années, s'il le jugeait à propos , et qu'il fût utile à son église, au service du roi
et à l'avantage commun de la ville de Lyon. Le duc de Mayenne le visita le len-
demain et conféra avec lui long-lemps. Ce sage gouverneur qui avait toujours vu
fort clair dans les affaires de la Ligue, lui prédit que la fin des états de Elois ne
 serait pas si agréable que le commencement, que la plaie des barricades de Paris
 saignait encore, et que la prise du marquisat de Saluées l'avait bien augmentée,
 que le duc de Guise ne pourrait jamais apaiser l'orage qu'il avait excité, et que
 le secours qu'il se promettait des étrangers le tromperait. Mandelot conserva
jusqu'au dernier soupir le même bon sens et une présence d'esprit aussi entière
 qu'il l'avait en pleine santé ; il mourut le 2 i novembre 1588, âgé de 59 ans (1).
Rien ne manqua à la magnificence de la pompe funèbre que son épouse ordonna
 lui être faite, mais dont le plus bel ornement fnrent les larmes mêlées aux bé-
 nédictions dont chacun s'empressait d'honorer sa mémoire ; elles partaient d'une
 affection sincère, d'une vive reconnaissance et d'une douleur extrême. Ses obsè-
 ques furent célébrées dans l'église primatiale , le jour de saint André, apôlre ,
 auxquelles assistèrent toutes les compagnies en corps et le duc de Mayenne. Le
 P. Emond Auger prononça l'oraison funèbre; il ne craignit point ^d'y louer sa
 fidélité et son atlachement au service du roi ; il eut même la fermeté d'insister
 avec force , quoiqu'en face du duc , sur l'obstination avec laquelle Mandelot
 avait toujours refusé de signer la Ligue. Ce trait fait honneur à l'orateur (2). II


  ( l ) Il étoit né à Paris le ao octobre l5ae). ( NOTE DES ÉDITEURS ) .
  ( a ) Le P. Emond Àuger, à qui la ville de Lyon doit beaucoup , tint ferme pour le parti du roi ,
après la mort de CG prince ; les guerres civiles le forcèrent à quitter sa patrie ; il se retira à Côme en
Italie, où il mourut ( l e 13 janvier I 5 Q I ) . Voyez la NOTICE par A. P. , Lyon , Barret, 1828 , in-8°«