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LETTRES D'HIPPOLYTE FLANDRIN 433 mon compte, je suis sûr de leur avoir toujours écrit dans cette proportion : trois pour deux. Il y a des moments que je leur en veux, mais ça ne dure pas longtemps, et si vous saviez le bonheur que me donne une lettre! Elle me rend plus gai, plus léger, elle me rend le courage de travailler, et à mes yeux tout devient plus beau; aussi je les conserve et trouve bien du plaisir en les relisant au bout de quelque temps. J'ai eu le plaisir de voir chez moi, il y a quelques jours M. Ozanam (8) et ses fils, dont un est vicaire à Saint-Louis, je crois. Ils m'apportaient une lettre de Lyon. Nous cau- sâmes un moment. Je leur fis voirie peu de chose que j'avais dans mon atelier et leur demandai la permission de les aller voir. Ils me l'accordèrent, mais c'était au moment du départ de Vibert. J'avais beaucoup à faire, je ne le quittais pas. Je n'y fus que quelques jours après; il venaient de partir pour Florence à l'instant même et ça m'a bien fâché. J'aurais beaucoup aimé à faire leur connaissance. Vous savez peut-être qu'il y a quelques jours on a découvert le corps de Raphaël. C'a excité à Rome beaucoup d'enthousiasme. Tout le monde, grands et petits, ont été le voir, lui rendre une sorte d'hommage. J'y ai été comme les autres, mais à regret. Je l'ai à peine regardé et main- tenant je ne vois plus cet homme si beau, si aimable, que sous la forme d'un squelette. Ça m'a fait de la peine et j'ai prié Dieu pour lui. Adieu, mon ami. Je vous aime et vous embrasse de tout mon cœur. Toutes les fois que vous pourrez m'écrire (8) Le docteur Ozanam, père du célèbre Frédéric.