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                  DE VICTOR DE LAPRADE                     427

cette cérémonie, était bien celui qu'il eût rêvé. Si sa
grande âme, planant au-dessus de cette foule respectueuse
et recueillie, a été témoin de cette glorification de son génie
et de ses vertus, ce n'est pas vers le monde officiel que son
regard se serait porté. C'est à ces vieux amis de jeunesse :
l'abbé Tisseur, le peintre Jamot, le professeur Gourju,
le poète Genin, qui étaient venus lui apporter un hommage
discret et ému, qu'il eût adressé d'abord un sourire recon-
naissant.

   Mais, à côté de l'amitié, un autre sentiment présidait
aussi à cette fête. Quand l'adjoint au maire de Montbrison
révélait la profondeur du patriotisme du poète, quand un
tout jeune étudiant répétait quelques vers de l'hymne
Morts pour la patrie, quand M. Léon Roux, président de
l'Académie de Lyon, rappelait les saintes colères du barde
patriote, un souffle frémissant semblait courir sur l'audi-
toire, comme pour le soulever et le dresser debout. Alors,
involontairement, ces vers de Victor de Laprade me reve-
naient à la mémoire :

       Je ne te verrai pas, réveil de la patrie,
       Mais ma voix expirante a voulu te sonner ;
       Mes vers entretiendront ta flamme et ta furie
       Quand moi je serai mort... et mort sans pardonner.

  Et je comprenais combien est puissante l'action exercée
sur tout un peuple par un grand poète, quand il s'adresse
aux plus nobles sentiments du cœur humain.

                                          A.   VACHEZ.