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106 PAUL HUMBLOT sent la créature et offensent le créateur. » Il ne comprenait pas l'athéisme, cette cécité morale, et plaignait les aveugles privés du sens qui voit Dieu ; mais sa grande bienveillance avait pour eux des excuses et des prières, et à ceux qui doutent de bonne foi, qui luttent et souffrent dans les incertitudes de leurs enquêtes, il ne marchandait pas ses sympathies et son estime. Il nous a lui-même donné la formule de sa tolérance : « Liberté pour les choses dou- teuses ; charité toujours. » Il était de ceux qui « servent Dieu de tout leur cœur parce qu'ils le connaissent », très tolérant pour ceux & qui le cherchent de tout leur coeur parce qu'ils ne le connaissent pas ( i ) . » C'était un grande religion que la sienne, étroite dans ses soumissions, vaste dans ses idées. Si Humblot ne s'était pas destiné au Barreau, il me semble qu'il eût été prédicateur et .j'imagine volontiers cet orateur sacré, debout, en chaire, dressant sa haute taille flexible sous la robe blanche du dominicain, dessinant dans le demi-jour d'une église son profil pâle et maigre, aux saillies osseuses et aux rides pleines d'ombres. Sous les voûtes d'une cathédrale, devant un public de femmes qui le troublaient et qu'il aimait, il eût développé, avec une liberté plus expansive, ces vastes thèses mystiques qui s'imposaient à sa pensée, le hantaient à la barre, trouvaient passage dans les causes les plus modestes, et furent souvent le charme, parfois aussi la surprise et l'étrangeté de ses discours. Mais le moine parlant dans la chaire de Notre-Dame des rapides oublis de la renommée, mesurant l'inanité des (i) Pascal.