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                 ET LE BARREAU LYONNAIS                     15

    Certes, l'improvisation, derrière ses tentations et ses
curiosités, cache d'étranges dangers et peut imposer à l'au-
dacieux qui les affronte, de cruelles émotions. L'inspiration
a parfois ses coquetteries et ses ingratitudes. Un souffle
l'attire mais un souffle l'éteint. Une impression pénible,
une disposition mauvaise et passagère de la santé, un rien
peut en paralyser l'essor. Et l'orateur, qui, confiant dans le
triomphe d'hier, aborde désarmé le combat, doit éprouver
un trouble profond, une inoubliable angoisse, lorsqu'im-
mobile dans le calme plat de sa pensée, il attend en vain le
vent favorable qui doit gonfler sa voile. On dit que le plus
grand maître de l'éloquence, le plus merveilleux des impro-
visateurs ne fut pas épargné par ces disgrâces. Mais à ces
périls quelle compensation ! Jamais l'art subtil ciselant le
 discours avec des délicatesses d'orfèvrerie, jamais l'artifice
 de la mémoire, ennemie du hasard, donnant au parleur la
 correction étudiée et savante de l'écrivain, ne vaudront les
 brusques désordres et les altières allures de la parole qui
 s'abandonne, ces incorrections hardies qui n'ont pas besoin
 d'excuses, ces révélations soudaines, ces découvertes inat-
 tendues, cette gerbe éblouissante du feu sacré.
    Dans ces surprises de l'éloquence, dans « cet inconce-
 vable travail de la parole soudaine », chaque talent, à
 l'improviste, révèle sa personnalité. La parole, dans son
 élan rapide;.- échappant à la direction, à la préméditation de
 la volonté, est le fidèle écho d'un esprit, la sincère traduc-
 tion de ses idées familières, l'explosion subite de ses plus
 intimes sentiments.
    Humblot s'y montrait tout entier, rêveur, mystique et
 poète.
    Chez lui, ce n'étaient pas les élans inaccessibles de
 Berryer, cette inspiration capricieuse qui, dissipant tout Ã